Grosse farce, ce film inédit en salles est une satire féroce de l’Amérique. De plus en plus à l’aise dans des rôles d’abrutis presque détestables, Will Ferrell va plus loin que ses camarades et démonte le mythe américain sans aucune gène. Hilarant !
Steve Carell n’a pas beaucoup de succès chez nous. Depuis une dizaine d’années, les films d’Adam Sandler ne dépasse pas les 100 000 entrées dans l’hexagone. Seul, Ben Stiller réussit à faire traverser l’Atlantique son humour scato-ironique. Cependant toute la bande n’a pas la même adhésion du public français. Seuls, Owen Wilson et Vince Vaughn obtiennent une certaine reconnaissance.
Ce n’est pas facile de faire rire les français quand on fait partie de tout ce groupe de comiques qui poussent loin le bouchon dans l’humour régressif. Et pourtant, il faut l’avouer qu’à force de blagues débiles, ces petits comiques finissent par atteindre un ton subversif et salvateur.
Celui qui va le plus loin, c’est à coup sûr Will Ferrell. Vu dans le film gentillet Elf, cet acteur, connu pour ses imitations irrésistibles de George W Bush, s’est fait une spécialité dans les seconds rôles déjantés (à voir d’urgence Old School) avant d’être une star et jouer des drôles de spécimens comme dans l’hallucinant Présentateur vedette : la légende de Ron Burgundy.
Doué pour interpréter les ignares insolents et prétentieux, il s’amuse aussi à caricaturer l’Amérique triomphante qui fait rugir de plaisir cette bonne vieille chaîne réac de Fox news. Le comédien se moque allégrement de cette Amérique et le box office le lui rend bien. D’ailleurs la sortie en dvd n’est pas du tout justifiée car le film fut un gros succès outre atlantique. Mais bon, les voies de la distribution sont impénétrables de nos jours.
Il ne faut pas s’étonner de croiser Sacha Baron « Borat » Cohen dans Ricky Bobby : roi du circuit. Comme ce britannique, Will Ferrell et son réalisateur taquine les défauts yankees qui passent là bas pour des valeurs ancestrales. Le texan en prend pour son grade, et c’est pourquoi le comique passe par l’un des sports préférés des rednecks, le nascar.
Ricky Bobby est donc la star de ce sport à grande vitesse. Débile comme un pare brise, mais surdoué de la voiture, il connaît ses premiers échecs avec l’arrivée d’un français (homosexuel et amateur de jazz), Jean Girard et tout son monde de gloire s’écroule. Il va falloir se reconstruire avant de retourner sur les pistes chauffées par le caoutchouc.
Récit initiatique assez grossier, le scénario n’est qu’une excuse pour des vannes d’une bêtise rare mais complètement assumée. Will Ferrell tape fort sur les clichés américains qui s’en prennent plein la tronche autour des compétitions de nascar. Nous sommes à un croisement détonant entre Cars et un film des frères Farelly (Mary à tout prix, Fous d’Irène). Comme eux, les auteurs de Ricky Bobby ont aussi une profonde affection pour leurs (anti) héros.
Car la réussite rapide de Ricky Bobby est un mirage. Le manichéisme est malmené par un film qui fait l’idiot mais qui se révèle malin. L’humour est moins léger qu’il n’y parait et les auteurs tapent allégrement sur le rêve américain avec les mêmes armes qui le servent.
C’est ce grand écart qui passionne. L’air de rien, avec sa tête de clown et ses blagues énormes, Will Ferrell et ses compères, pratique une ironie mordante et spectaculaire. Franchement, il serait temps que l’on se mette en France à jalouser ce talent !
Avec Will Ferrell, John C. Reilly, Sacha Baron Cohen et Amy Adams Gaumont Columbia Tristar – 2006 – 1h45