L’hyperréalisme comme alerte
Michu, Les Vacances, Rixe, La Vocation sont quatre courtes pièces de Jean-Claude Grumberg regroupées par Jean-Louis Benoit sous le titre Les Autres. Avec comme fil conducteur une famille composée du père, de la mère et de deux fils, Les Autres s’attaque aux mécanismes du racisme, de l’antisémitisme, de la xénophobie, de la différence incomprise, source de peurs et d’horreurs.
Le père joué par un excellent Philippe Duquesne a l’apparence du type banal et simple. La mère jouée par Nicole Max a tout de la femme soumise au système patriarcal. Le couple navigue ainsi du lit conjugal, au restaurant de vacances, en passant par la vie de famille au domicile en compagnie des deux fils. A chaque fois, l’étranger, l’autre, l’imprévu, le mauvais fils, surgit au milieu de la fable et déstabilise le père qui réagit alors avec toute sa monstrueuse bassesse, parfois avec orgueil, parfois avec lâcheté mais jamais sans sourciller, sans se questionner. Le pouvoir aveugle et destructeur du père y est montré comme réducteur des différences et volonté de faire l’autre à son image, en s’en moquant, en le chassant ou en le tuant.
Dans cette mise en scène épurée de la vie quotidienne, les textes acérés et crus de Grumberg prennent toute leur ampleur et mettent en tension le spectateur avec les comédiens. Celui-ci ne peut que s’interroger sur la violence des mots employés, directs, et en dehors de tout contrat social. Le rire du spectateur agit aussi bien pour marquer le désaccord devant la radicalité que pour exprimer un malaise devant un discours décomplexé de la haine de l’autre ou des relations familiales malsaines. Seule une porte battante acharnée contre un personnage finira par rappeler que nous sommes dans une comédie théâtrale et que tout n’est que bouffonnerie.
Les Autres est d’utilité publique, c’est certain. Le discours idéologisé et outrancier de Grumberg permet très efficacement à chaque spectateur de se situer et d’observer les dérives de la haine dans une France de l’ombre, une France animée parfois de rencontres ratées avec l’altérité et l’humanité de l’homme.
Durée : 1h40
Représentations :
Du 23 novembre au 23 décembre 2017
Du jeudi au samedi à 20h30
Samedi et dimanche à 16h00