Henri est un matheux un peu autiste sur les bords. Alors qu’il vient de perdre son job d’actuaire dans une compagnie d’assurance, il hérite d’un parc de loisirs plein de surprises.
Henri réduit tout au raisonnement mathématique (c’est le running gag du livre…). « J’avais juré très jeune que ma vie se fonderait sur la raison, la planification, le contrôle et l’absolue nécessité de regarder la réalité en face et de toujours peser avec soin le pour et le contre. Dès l’enfance, j’avais vu dans les mathématiques la clé pour y parvenir. L’humanité était traîtresse, pas les chiffres. Le chaos régnait autour de moi, eux étaient garants d’ordre. » (page 73)
Henri va à l’essentiel et ne s’encombre ni de possessions matérielles superfétatoires ni de relations humaines qui ne seraient pas strictement indispensables. Sa vie est bien rangée, et cela lui convient très bien : » Je trouvais plutôt inutile, dans la vie, d’aller au-devant des difficultés ; elles vous trouvaient bien assez vite d’elles-mêmes. » (page 61)
Lorsqu’il se retrouve soudainement chômeur puis propriétaire d’un parc d’aventure (pas un parc d’attractions, nuance), il pense naturellement gérer l’entreprise de façon rationnelle, comme il résoudrait « une complexe équation tridimensionnelle » (page 283). Mais évidemment, sa vie paisible va se retrouver bouleversée par l’aventure. D’ailleurs, au début du livre commence tandis qu’un « homme lourdement bâti, un gros balèze vêtu de noir » (page 13) le poursuit dans le dédale du parc. Et ce n’est que le début !
Malgré les tentatives (pas toujours réussies) de l’auteur de créer du suspens et de l’action, la lecture de ce livre ne recèle pas de grandes surprises. Les méchants sont caricaturaux, le personnage principal aussi et l’on n’est pas du tout surpris que sa rationalité se fracasse sur la réalité (y compris la réalité des sentiments).
Ce n’est certes pas désagréable, c’est même assez drôle mais pas passionnant non plus ; on est dans le pur divertissement. Ça fait penser à une série scandinave un peu cheap du genre de celles diffusées sur Arte. D’ailleurs, on sent bien que l’auteur – Antti Tuomainen – verrait bien son livre adapté à l’écran, fut-il petit. En témoignent, outre le fait qu’il termine son récit sur une fin ouverte, sa propension à remplir des pages de dialogues et à multiplier les gags macabres.
Ce matin, un lapin est le premier volet d’une trilogie. Personnellement je m’arrêterai là.
Paru en poche le 1er juin 2023
10/18 Polar
Traduit du finnois par Anne Colin du Terrail
384 pages / 8,90€l