Grand vainqueur des derniers Oscars, Birdman a toutes les qualités et les défauts de son cinéaste, auteur de Babel, 21 Grammes et autres drames qui ne font pas dans la demi-mesure.
Son style va pourtant bien à la folie qui habite Riggan Thomson, ancienne star d’Hollywood qui décide de monter une pièce de Raymond Carver à New York. Le bonhomme est hanté par son personnage de super-héros et il doit ainsi se découvrir acteur plutôt que star has been.
Un long faux plan séquence va donc nous conter la lente mutation de ce type torturé qui doit en plus subir les foudres de twitter, de comédiens mégalos, d’une fille droguée et d’un producteur un peu cinglé. Dans son théâtre de Broadway, la comédie lorgne souvent avec le tragique sur scène comme en coulisses.
Alejandro Gonzalez Inarritu est un virtuose. Sa caméra est omnisciente. Elle se promène dans le temps, l’espace, dans un unique élan qui effectivement impressionne. Il mérite son Oscar. Il a bien bossé et nous en met plein les mirettes.
Cependant cette extraordinaire talent possède lui aussi un ego qui finit par gêner : que raconterait Birdman s’il n’était pas filmé avec cette vitalité hors norme ? Peut-être une comédie dramatique sur la déchéance ! Ou une critique méta amusante sur le statut de star ou de comédien ! Mais rien de transcendant.
On s’amuse donc avec les clins d’œil à Hollywood et Broadway. Le « name-dropping » fonctionne à plein régime. Michael Keaton, ancien Batman, se lâche dans ce personnage qui lui ressemble beaucoup. Tous les acteurs sont électriques, proches de l’hystérie. Cela va avec le propos.
Sûr de ses forces, Inarritu se plait à critiquer le narcissisme mais avec sa mise en scène tapageuse tombe aussi dans une position de « m’as-tu vu ». L’énormité de la mise en scène empêche le spectateur de comprendre les personnages et les envies du cinéaste. Reste la spectaculaire virtuosité qui pourrait faire date effectivement…
Avec Michael Keaton, Emma Stone, Edward Norton et Naomi Watts – Fox Searchlights – 25 février 2015 – 2h