Une pièce de femmes éprises de liberté et de passion, ployant sous le poids des traditions. Une ambitieuse entrée au répertoire de la Comédie française.
Cinq sœurs viennent de perdre leur père. Comme le veut la tradition andalouse, leur mère leur impose huit années de deuil. Huit années isolées, enfermées, frustrées.
Au milieu des querelles familiales, Adela, la plus jeune sœur incarne une soif de liberté, d’amour et de jouissance. Dans sa robe d’un vert éclatant, elle offre de l’air à l’oppressante tension de l’histoire. Ses nuits avec Pepe le Romano offrent un splendide tableau d’amour sur un air de violoncelle. Et le passage dans la blanchisserie, une merveille.
Par une mise en scène intelligente, Lilo Baur illustre la violence de la société espagnole à l’aube de l’arrivée de Franco. Elle nous plonge dans son carcan catholique pudibond. Sa morale implacable et son effroyable austérité s’illustrent dans une ambiance cloitrée. Dans l’ombre, on ne manque pas d’applaudir le travail remarquable de la lumière de Fabrice Kebour qui perce à travers les moucharabiehs d’Andrew D Edward ainsi que la beauté de la musique de Mich Oscowiak.
On salue enfin et surtout la performance des comédiennes. Cecile Brune en matrone acariâtre et Elsa Lepoivre en servante exubérante sont criantes d’une humanité complexe. Adeline d’Hermy en cadette espiègle et excitée attendrit, comme Anne Kessler en aînée enlaidie fait rire. Félicitations à elle de s’être si bien appropriée le rôle d’Augustias en quelques jours.
Dans cette pièce huis-clos de femmes écrite en 1936, l’auteur espagnol Federico Garcia Lorca puise dans ses souvenirs d’enfance, entouré de femmes, et ses années de jeunesse, marqué par l’annonce de son homosexualité, vécue comme une transgression de l’ordre social de l’époque.
Du grand art. A voir avec audace.
Jusqu’au 25 juillet 2015
Comédie Française, Paris