En ce moment mes chers amis, mes chers lecteurs, mes petits lapins, mes fidèles abonnés, vous tous mes fans, vous mes détracteurs, vous mes rieurs, vous tous mes frères, vous toutes mes sœurs, amen, ce n’est pas le froid, glacial je vous l’accorde, et moi perso quand il fait froid je ne sens plus mon petit orteil droit, chacun son truc, qui nous lamine la peau les cils les doigts, mais, si l’on en croit, matin et soir, midi et nuit, de par nos yeux, de par nos oreilles, de par nos tous nos sens, ce que nous entendons, lisons, voyons, à travers tous les pores de l’épiderme médiatique, à travers chaque écran, chaque imprimé, chaque onde…oui, nous sommes frappés d’un mal bien plus grave que le froid !!!
Oui, oh que oui, je ne voulais pas y croire, car moi je suis heureux, mes parents ne voulaient pas y croire, car ils se disaient heureux, ma sœur, au loin au Canada, ne voulait pas y croire, car elle dit à qui veut l’entendre qu’elle est heureuse, ma grand-mère, 88 ans, ne voulait pas y croire, car elle aime à dire qu’elle est heureuse et qu’elle a eu une drôlement belle vie, mes amis, en soirée, faisaient-ils semblant, trempaient-ils finalement leurs lèvres meurtries de mensonges et de faux semblants dans l’alcool, juste pour me faire croire jusqu’au petit matin qu’ils étaient heureux ; cet enfant croisé l’autre matin au détour d’une rue, plié de rire, son père aussi, ses esclaffements traversant les murs du bureau de tabac voisin, à en faire plier de rire à leur tour tous ses occupants, mentait-il lui aussi, portait-il un masque rieur à l’instant même où au plus profond de lui, il hésitait déjà, du haut de ses 4ans, entre la corde et le gaz ; tous ces gens, la tête haute et les mains enlacées, déambulant samedi dernier à travers toutes les villes de province, à chercher la bonne affaire, à profiter des -50% sur un inutile bijou, juste pour le plaisir, étaient-ils eux-aussi, malgré la carte bleue frissonnante, parfaitement conscients, que tout ça n’était que leurre, n’étaient que faux rires, n’était que dissimulation juste parce que j’étais là, pour me tromper, détourner mon regard positif à l’égard de la vie ; comme cette BMW qui m’a encore doublé hier soir, puis une Audi, puis un 4×4 Nissan, puis une 3008 toute neuve, sur une route de campagne de la Sarthe, pas à Boulogne-Billancourt, non non, dans la Sarthe, n’était-ce pas là les parfaits camouflages de mobylettes trafiquées car, comment, en période de crise, de récession, de guerre, de terrorisme quotidien, peut-on s’acheter de telles voitures !!! AHahahahahaha, on ne m’y prend pas.
Car oui, je ne suis pas fou, je ne suis pas crédule, je m’informe moi madame, je ne me laisse pas prendre par les bons sentiments, par les sourires familiaux, par les rires des amis, ou par ceux des enfants, par les attroupements dans les magasins, par les paquets cadeaux qui dégueulent du caddie, par les cartes postales de sport d’hiver, par les crédits pas chers, par ces jeunes cons de startupers qui veulent développer l’avenir et générer des richesses nouvelles en ouvrant le monde devant eux et devant nous, pas plus apitoyé je suis par les mariages heureux, par les naissances joyeuses, par la jovialité des stades, de l’engouement zizanique des publics de spectacle et de concert qui n’ont jamais été aussi nombreux et chantants !
Ah ça non, moi madame, j’ai regardé tous les débats aux primaires, celles de droite, celles de gauche, plus les autres, les citoyennes, les écologistes, et puis toutes les soirées électorales, avec les débats qui vont avec, et tous les mecs en cravate l’ont dit, alors du coup, je me suis nourri 24/24 de tous les instants médias, des matinales radiophoniques, des matinales BFMesques, des 13h pernaultisés, des 20h, des flashs, des breaking news, des interviews, des unes de magazines, et oui, ils sont tous unanimes, c’est la crise, c’est la guerre, c’est la fin, enfin presque, alors arrête de sourire, tu m’agaces, tu nous fatigues, tu peux pas faire comme tout le monde, faire la gueule, être aigri, être anti tout, être pour rien, contre tout, détester l’autre, faire semblant d’être compatissant sur la faim dans le monde, alors que seule ta tronche compte, que quand il t’arrive quelque chose d’heureux, plutôt que de t’en réjouir tu as le devoir de porter un masque sombre ; ne vois tu pas, tous ces gens dans la rue, les brouettes pleines de billets qui ne valent plus rien, tous ces enfants qui vont à l’école nus, faute de frics, qui courent pieds nus sur l’asphalte, toutes ces centrales électriques qui ont cessé de fonctionner il y a déjà des années, c’est pour ça que t’as plus de chauffages, plus de portables, plus d’écran, plus rien ; ne vois tu pas, tous ces quais de gare vides, sans voyageurs, tous ces aéroports aux tarmacs sans avions, sans vols vers ailleurs, plus les moyens, plus rien ; n’entends tu pas, tous les soirs, ces bombardements sur Evreux, sur Toulouse, sur Marseille, sur Rennes, tous ces chars qui traversent ta ville ; ne croises-tu pas tous ces hommes habillés d’une simple peau de bête, prêt à violer tes nièces, prêts à te faire la peau, car oui, c’est la jungle, le retour à l’âge primaire, quasi de pierre, quasi sauvage, quasi tous des loups, la loi du plus fort, car oui, il n’y a plus de tribunal pour te défendre, plus de sheriff dans la ville, plus de magasins aux rayons fournis, car leurs allées sont vides, plus personne n’y passe, le cannibalisme s’annonce !!!
Aux détours d’un feed Facebook, je voyais les photos vue d’une fenêtre sur une montagne magnifique avec un « bien arrivé aux sports d’hiver », suivi sur cette même page de la même personne d’un « une vidéo qui nous fera rire en période de crise »…tien donc…la voilà la vérité, le voilà le sens des choses, même quand tout va bien, ou du moins pas si mal, pour une majorité, pour beaucoup, petits et grands, il convient d’être triste, il convient de faire la gueule, il convient d’avoir peur, peur de quoi, sombre con, peur de toi, peur d’avoir peur, peur d’être toi, préférer s’effrayer d’un petit rien, d’un événement qui ne te concerne même pas, toi bien au chaud, parce que tout le monde dit qu’il n’est pas tendance d’être heureux, alors de flip de trouilles, impalpables, intangibles, sans même le moindre exemple dans ton quotidien, tu aimes à dire que t’as peur de l’avenir, même quand t’as 95 ans, que t’as peur du futur, même quand t’as 18 ans, alors que c’est à toi de le construire, ce futur, ce destin, avance bordel, quand on pisse dans son froc on n’a pas chaud longtemps. J’ai une bonne nouvelle pour toi, en fait t’es heureux, en fait t’es bien, en fait t’es en France, en fait y’a pas la guerre, en fait le supermarché est ouvert jusqu’à 20h et ses rayons son pleins, en fait elle marche la centrale électrique, et c’est même grâce à ça que tu peux brancher ton portable et mettre des conneries sur les réseaux sociaux, en fait si tu veux un job, faut juste être heureux, parce que le mec qui va te payer, c’est sa vie sa boite, et le fait de voir un gars tous les matins faire la tronche, jamais heureux, jamais content, bah oui, il va en prendre un autre
que toi à force, faut juste se sortir un peu les doigts, voir ce que toi tu peux apporter à la Société, pas perpétuellement ce que la Société peut t’apporter, tu lui reproches de se laisser aller, d’être moins sexy, mais t’as pris 15 kilos, tu lui en veux, à la Société, de ne plus mouiller comme avant, mais toi t’arrives pas à bander, comment veux-tu l’exciter. Alors avance, arrête de gémir, bouge, réfléchis par toi-même, voyage, même avec rien, sors de ton trou, sors de ta bulle, sors de ton terrier, tu vas voir, dehors il fait beau, il fait un peu froid, ok, mais déjà il fait beau.
Avance, arrête de faire la gueule, tu m’agaces, et n’oublies pas de sourire, s’il te plait.000000000000000000000000000000000000000000
Allez, j’t’embrasse.