Jeune femme
Caméra d'or au dernier festival de Cannes, le film de Léonor Seraille est un concentré de cinéma français et ce n'est pas forcément un défaut!
Pourtant les artificies du cinéma français indépendant sont là! Budget riquiqui, c'est de la bonne vieille caméra à l'épaule dans un Paris terre à terre, avec des aventures de solitaires qui rebondissent de petits appartements en mini surfaces!
Au milieu de tout ça, il y a une actrice. Laetitia Dosch est surdouée. Elle bluffe et crêve l'écran. On la croise dans plusieurs productions indépendantes mais là, elle prend le contrôle: saisissante, simple et superbe. Elle joue une femme insaisissable. Paula, arrive, sans rien, à Paris, après dix ans d'absence.
Ce n'est pas une nouveauté. L'observation d'une femme seule. Mais la comédienne crêve l'écran et elle nous attrape dans une course folle dans Paris. Car le film célèbre l'instabilité, la différence, la marginalité et la douce folie. Un vent de liberté souffle sur l'oeuvre, fraiche et rapide.
Les subtilités se font dans la mise en scène. Léonor Seraille propose des petits détails qui font une certaine subtilité autour d'un personnage parfois fatiguant mais toujours fascinant. Imprévisible, Paula n'est pas qu'une hystérique comme le suppose la première scène, fausse piste étonnante.
Sur des sujets rabachés et un peu trop stéréotypés, on se surprend à aimer cette fille paumée dans la ville.
Avec Laetitia Dosch, Grégoire Monsaingeon, Souleymane Seye Ndiaye et Léonie Simaga- Shellac sud - 2017
Rôle : Yuki
Paralympiques, les 10 épreuves les plus folles !
Ah bah voilà, ça y est, on va encore crier au loup avec cette chronique, ouuiiiiiiiii le mec ne respecte rien, c’est vrai, ouiiiiiiiiiiii le gars va encore inventer des trucs farfelus foufous alors que nous on veut de l’info de la vraie, mouep, ouiiiiiiiiiii c’est pas beau de se moquer de sportifs handicapés alors que bon toi tu ferais pas 10% de ce qu’ils font eux, pas faux du tout. Alors comme d’hab je répondrais, et donc ?
Donc si j’ai envie de faire le déglingo et de mettre ici, en quelques lignes, l’espace de quelques minutes d’écritures de chronique des choses complément barges ; je le fais !
De fait, après des JO d’hiver avec décalage horaire de maboul au pays de la K-Pop, voici donc les JO d’hiver pour les paralympiques toujours au pays de la K-Pop, on enlève juste un bras une jambe un œil et hop c’est la même.
Aussi, curieux comme un ragondin, furtif comme le furet et agile comme la mangouste, je m’intéresse, mieux, j’invente, mieux, je devine, pis, je dessine, alors inventons intéressons nous dessinons aux 10 épreuves que vous ne verrez pas aux JO paralympiques mais comme de toute façon la probabilité de voir les vraies épreuves restent faible, autant y aller béton. Let’s go !
1. Le tremplin fauteuil 120m : Epreuve reine, elle parle d’elle-même, chaque athlète se présente en fauteuil roulant en haut du tremplin, on glisse, on saute, on atterrit, ou pas. Bien sûr, le but est d’arriver sur les 2 roues, le plus loin possible, mieux, en vie.
2. Le Super-G en roulé-boulé : Réservée aux athlètes sans bras sans jambes, ce super slalom consiste à descendre 3,5km de dénivelé en boule, le public pour cause d’avalanche fréquente, n’est pas autorisé.
3. Le biathlon aveugle : Même principe que le Biathlon valide mais sans les yeux, des cibles géantes de 6m sur 6m de diamètre seront disposées cette année pour faire en sorte qu’au moins un concurrent en touche une, en 2014, les 28 concurrents avaient fait chacun 20 tours de pénalité faute de cible atteinte ; l’épreuve avait duré 79h, ce qui est trop.
4. Le Bobsleigh poussé tête conduite dents : Les engagés sont une fois encore déficients des membres supérieurs, oui bon bref ils n’ont pas de bras quoi, et donc poussent le bobsleigh au départ uniquement avec la tête ; la conduite du bobsleigh s’effectue à l’aide des canines et des molaires. L’équipage américain Bob Melon et John Emaildiamant sont favoris.
5. Le patinage fauteuil en couple : Un homme une femme deux fauteuils, des tutus, des fuseaux fluo des 70’s, de la musique classique, de la romance, des portés, des triple roue lutz piqués, un spectacle maginifique.
6. Le Short-Track plat ventre relais 4x2km : Comme le dit le vieil adage lituanien « pas de pieds pas de patins », aussi, pour le short-track plat ventre, les 2km de circuit de la patinoire olympique se font à plat ventre, avec leur technique dite de l’alligator, l’équipe australienne est grande favorite.
7. Le half-pipe poirier : Faute de jambes, les concurrents enfilent des mini-skis aux mains et s’élancent sur le half-pipe la tête en bas pour y faire des figures de folie sur des rampes de 6m de haut, la vrille vrille 360° roulade avec retombée sur les couilles est le plus gros coefficient !
8. Le super combiné descente slalom sur 42km : Là, gros bordel, mal voyants, unijambistes, en fauteuil, sans les bras, sur un ski, tout le monde peut participer, l’épreuve de 42km qui va de Séoul Nord à Séoul sud se déroule sur 4 mois, très peu d’inscrits lors des précédentes éditions, allez savoir pourquoi !
9. Le ski bosse fauteuil : Sorte de rodéo sur une pente vertigineuse, généralement effectué par les concurrents survivants du tremplin fauteuil 120m, les athlètes s’élancent pour 2km de bosses en fauteuil, ça secoue pas mal, mais c’est sensation forte assurée !
10. La flamme olympique mal voyants : Clou du spectacle avec probabilité d’incendie façon forêt californienne en plein été, les concurrents sprintent sur 500m avec une flamme paralympique dans le noir complet et doivent allumer la vasque. On se marre, on rigole, bon des fois ça sent un peu le brulé, mais visuellement c’est magnifique. Le coréen Kim-Voy-Pa et le suédois Hans Nakinoeilson demeurent les grands favoris pour cette édition 2018.
Voilà, j’avais prévu que je ferai mon irrévérencieux, c’est fait, troisième degré (aucun rapport avec la dernière épreuve quand je parle de 3ème degré) mis à part, plus sérieusement donc, branchez vous sur France TV durant cette 15aine paralympique pour admirer les performances de ces athlètes, des grands, des très grands.
Allez j’vous embrasse.
Borg/McEnroe
Combat de titans, le légendaire match de tennis entre deux champions devient un film intime, habité et passionnant. Ce qui n'est pas si évident.
Le tennis est cinégénique. Les gestes. La dramatisation. La structure. Tout ressemble à une pièce de théâtre ou un écran de cinéma. On y joue des comédies et des drames. Ici, dans le cas du film suédois de Janus Metz, c'est un peu des deux!
Car le film s'intéresse à deux icones de ce sport. D'un coté, il y a Borg, la machine à gagner qui se refuse à tout sentiment. De l'autre, il y a le bouillant Mc Enroe, star montante qui se sert de la détestation pour avancer vers la victoire. Tout oppose ces deux là, qui en 1980, se retrouvent sur le tournoi de Wimbeldon. L'affrontement semble inévitable pour les deux hommes et la pression monte rapidement autour des deux stars.
Avant d'arriver à ce match légendaire, le réalisateur met en place soigneusement son duel. Il filme la solitude d'un héros, perdu dans sa rigueur, à quelques coups de raquettes de tous les records. Il observe aussi son ennemi naturel, fou mais courageux.
La reconstitution est habile. On baigne dans les illusions des années 80. Borg est au crépuscule de sa carrière tandis que l'Américain annonce l'Amérique de Reagan, agaçant mais efficace. Mais au delà de tout cela il y a la caractérisation des personnages. Le réalisateur pousse l'intensité loin, remontant dans la jeunesse des sportifs.
Ca pourrait ressembler à de la psychologie de bazar mais on se prend d'affection pour ces deux torturés, obsédés par l'exploit. Sans temps mort, le film s'intéresse à cette énergie du désespoir, qui sert finalement de carburants aux plus belles histoires. Spectaculaire et intime, ce film surprend et on se demande quand est ce que ca recommence Roland Garros?!
Avec Sverrir Gudnasson, Shia LeBeouf, Stella Skasgard et Tuva Novotny - 2017 - Warner Bros
The Propelled Heart, Alonzo King Lines Ballet, Lisa Fisher, Chaillot
Formidable alliance de la danse et du chant, le chorégraphe Alonzo King et la chanteuse Lisa Fisher nous offre un spectacle envoutant qui nous touche droit au coeur.
Depuis 1982, Alonzo King s'évertue à proposer une danse classique "moderne". Il n'hésite pas à déstructurer et concilier des influences différentes : jazz, ballet classique, chant lyrique… C'est d'ailleurs ce que l'on peut ressentir en assistant au spectacle "The Propelled Heart".
D’un point de vue chorégraphique, Alonzo King reste fidèle à son esthétique en utilisant un langage basé sur la technique classique : grandes extensions, lignes cassées et angulaires en sont les principales caractéristiques.
La compagnie Lines ballet offre une performance que l’on pourrait qualifier d"organique". Les danseurs évoluent tels des animaux dans les premiers minutes du spectacle. Il y a un jeu qui s'installe entre la voix gutturale de Lisa Fisher et les gestes hypnotiques des danseurs. A mi-chemin entre le combat et la collaboration, le pouvoir du chant répond à la beauté de la danse. Le spectacle nous prend aux tripes.
La pièce "The Propelled Heart" s'appuie sur l’enseignement du gourou Sri Yukteswar. Lequel, dans La Science sacré, décrit cinq états du cœur humain : obscur, animé, constant, consacré et pur.
L’état du cœur animé (propelled heart) correspond ainsi au moment où l’individu, doutant du réel, se met en quête de vérité. Sri Yukteswar écrit : “Lorsque l’Homme est un peu éclairé, il compare les expériences de la création physique qu’il a à l’état de veille avec les expériences qu’il a dans son sommeil. Il comprend que ces dernières sont simplement des idées, et il se met alors à douter de l’existence substantielle des premières. Son cœur se sent donc poussé à connaître la nature réelle de l’univers. Luttant pour se débarrasser de ses doutes, il cherche des preuves pour établir ce qu’est la vérité.”
Si "The Propelled Heart" célèbre la magnifique voix de Lisa Fischer, l’énergie, la passion et l’engagement des danseurs restent remarquables. Ils sont d’une grâce envoûtante et un très grand charisme émane d’eux.
The Propelled Heart
Avec Alonzo King Lines Ballet et la chanteuse Lisa Fisher
Théâtre National de la Danse – Chaillot
Grosso modo
A coup sûr, Grosso modo sera le disque le plus exotique de l'année!
Nos cousins de l'autre coté de l'Atlantique ont un accent. On l'aime cet accent. Ils nous envoient des chanteuses qui font pêter les ampoules et les oreilles mais il suffit qu'elles ouvrent la bouche pour que l'on tombe en amour.
Les Canadiens seraient depuis quelques temps un havre de paix et un possible idéal avec une société qui résiste au froid, qui kiffe l'immigration, qui a un premier ministre super cool et qui déguste de la poutine. Il y a bien des contestations (relayées par les rustiques et charmants Cowboys Fringants) mais le Canada, c'est la France en mieux. Du moins, c'est le fantasme.
En tout cas, on peut désormais être jaloux de leur rap. Grosso Modo montre un flow débridé et surtout une musicalité qui nous manque beaucoup. Chez nous, tu trafiques ta voix et voilà, tu es rappeur! Seba et Horg sont des sacrés rappeurs. Ils aiment les mots. Les jeux de mots. Les punchlines cinglantes. Les rimes riches. Il y a bien l'accent qui amène tout l'exotisme que l'on attend mais ca n'empêche pas d'admirer le talent du duo québecois.
Car la musique fusionne parfaitement avec les verbes. La mélodie et l'harmonie ne sont pas du tout sacrifiés. Les sons promettent un groove à l'ancienne mais très bien travaillé. Ce n'est pas nouveau mais c'est de la science toute maitrisée qui fait du bien à entendre. Ils ne font pas le coup du "c'était mieux avant"! Ils puisent dans leurs souvenirs et mettent leurs tripes dans leurs chansons, exotiques mais toujours réjouissantes. Une façon de travailler qui devraient s'exporter dans nos contrées!
la be - 2018
Annihilation
Si l'on considére que la science fiction est une forme d'extrapolation sur la condition humaine, une philosophie incarnée ou un discours sur la Monde, alors le second film d'Alex Garland est plutôt une réussite. La fiction se met bel et bien au service d'une réflexion.
La réflexion est hélas bien connue: nous sommes bien peu de choses dans ce bas monde et la Nature pourrait bel et bien nous jouer des tours. Le nombrilisme humain est un cancer quand on se met à réfléchir à notre place dans l'Univers. Le refrain est connu mais la demande d'humilité proposée par ce genre de films n'est pas désagréable, bien au contraire. On la souhaite plus présente!
Scénariste de Danny Boyle, réalisateur d'un très bon premier film fantastique déjà, Ex Machina, Alex Garland est un filou et son film se donne des grands airs et pourtant finalement il aurait gagné à rechercher plus d'efficacité. Et de la simplicité. Avec un même sujet, John Carpenter aurait fait certainement une grande série B.
Ici, on ne sait pas trop si c'est du lard ou du cochon. Avec la présence de la gracieuse Nathalie Portman, le film se doit d'être impressionnant. Il l'est par moments. Avec son idée de zone isolée avec la nature en folie à l'intérieur, le film pouvait nous faire décoller. Ca arrive très peu. Avec son expédition féminine au centre de cet endroit dangereux, on pouvait espérer un film d'aventures. Hélas, elles parlent beaucoup et subissent beaucoup nos aventurières.
Heureusement les intentions sont bonnes. La mise en scène est habile. Si on excepte la musique (vraiment nulle de chez nulle), le film nous embarque dans un étrange voyage et explore les sentiments et l'âme, plus que les mystères attendus. Le cahier des charges de la sf est donc respecté. Les attentes du spectateur, un peu moins!
Avec Nathalie Portman, Jennifer Jason Leigh, Tessa Thompson et Gina Rodriguez - Netflix - 1h50
Les Affamés
Tout ce qu'il ne faut pas faire, Les Affamés le fait! Ca en devient très drôle! A s'en décrocher la machoire devant un film de genre en décomposition!
Le zombie est il fatigué? Depuis sa renaissance avec le succès de Walking Dead, le monstre semble être en mille morceaux et ne ressemble plus à la créature que feu Romero a inventé en 1968. Il était le symbole d'une révolte, d'une critique, d'un effroi primaire.
Dans les Affamés, le mort vivant est en robe de chambre. Il se perd dans la nature. Il court bien vite dès qu'un morceau de viande se promène dans la forêt. Il construit des montagnes de chaises et les admire avec son mythique regard de bovin.
En gros, au Québec, le zombie vit à la campagne et cherche surtout à occuper son ennui ou son immortalité en collectionnant des chaises. Pourquoi? On ne sait pas trop mais pour Robin Aubert, le réalisateur canadien, cela a sûrement du sens. Pour nous c'est juste du grand n'importe quoi, dans un film proche du nanar totalement fauché.
Mais ca nous permet d'assister à un spectacle absurde, avec des personnages rigolos et des comédiens pas toujours convaincus par le mal qui rôde et l'apocalypse qui s'annonce. On ne va pas être méchant mais l'accent ajoute une petite pointe comique à l'ensemble qui tombe bien souvent dans le grotesque.
Tout sonne faux. La production semble baclée. Les acteurs se débrouillent comme ils peuvent avec leurs armes et leurs ennemis. Le scénario est trop épuré. La contemplation ne va pas bien au film de zombies. L'ambition est peut être là (la nature est très jolie et bien filmée) mais le résultat est à ranger avec les tonnes de navets qui se font faits après le succès de L'armée des morts, en 2004, electro choc qui a réveillé les zombies! Il serait peut être temps de faire une petite sieste!
Avec Marc André Gondrin, Monia Chokri, Brigitte Poupart et Charlotte stMartin - 2018 - Netflix
In a poem unlimited
On revient un peu à notre thématique annuelle: la libération de la parole des femmes. Les disques au féminin sont nombreux et surtout ils sont bons: la preuve avec l'album de US Girls.
Avec un titre comme cela, le groupe de Meghan Remy ne peut que faire l'actualité. Les filles aux Etats Unis, c'est un moment d'histoire en ce moment. Avec un président sexiste, des libidineux qui tripotent en toute impunité et des stars qui se confient, on se rend bien compte que la condition des femmes a encore un sacré pour de chemin à parcourir pour trouver un semblant de liberté ou d'égalité.
Mais nous ne sommes pas là pour la politique mais pour parler du sixième album de ce groupe canadien qui n'a pas froid aux oreilles. Discret, le groupe suit sa route et commence à prendre la bonne direction: la musique de US Girls réchauffe.
La jeune femme et ses complices sont au carrefour des styles: il y a la fois de la radicalité et du classicisme. C'est de la pop énervé ou du rock'n'roll futé. Les arrangements sont d'abord crus avant de laisser de la place à de la complexité. Les instruments se répondent entre eux et on entend à chaque écoute des petites choses qui font plaisir à écouter.
Au delà de la posture de la chanteuse, pas loin de la protestation et de la dénonciation. Bizarrement les chansons à message sont usantes. Ici, elle utilise la légèreté de la pop et la beauté des orchestrations pour adoucir le propos. Cela gagne en efficacité.
La vie de Remy ne fut pas un long fleuve tranquille mais ce n'est pas la motivation de son disque. Les harmonies et les mélodies transcendent les douleurs et les volontés. In a poem Unlimited voit plus loin et nous emmène plus haut. C'est peut être un peu répétif. La voix ressemble un peu trop à celle de Kate Bush. Mais on ne s'ennuie jamais dans ce poème vers lequel on peut revenir sans fin.
4 AD - 2018