La leçon du mal, Yûsuke Kishi, 10/18
Un livre pour les amateurs de violence gratuite à la Tarantino. Un véritable scénario de série Z.
Seiji Hasumi est le séduisant professeur principal de la 1ère 4 du lycée Shinkö Gakuin, qui s'occupe personnellement de chaque membre de sa classe. Entre les élèves et le corps enseignants, on doit être pas loin de la trentaine ou quarantaine de protagonistes, dont certains ont des noms très proches (Sonoda avec des o comme prof de sport et Sanada avec des a comme prof de math...). Accrochez-vous pour vous y retrouver dans la foultitude de personnages. Personnellement, j'ai dû prendre des notes.
Assez rapidement, on comprend que ce professeur idéal n'est pas si gentil que ça. Manipulateur et dépourvu d'affect, il ne recule devant rien pour parvenir à ses fins. Le livre va donc inévitablement sombrer dans la violence la plus crue, la plus gratuite et, pour moi, la plus ennuyeuse qui soit.
Pour ce cocktail vu et revu, comptez trois doses de violence (ça dézingue à toute berzingue, avec des meurtres par pendaison, immolation, défenestration etc. etc.), deux doses de manipulation machiavélique (avec un personnage aussi séduisant qu'amoral), et une bonne dose de cul (y comprises l'incontournable infirmière cougar et nymphomane et les scènes de domination soft à tendance pédophilique...).
Pour couronner le tout, je trouve d'assez mauvais goût le fait de publier en France, après le Bataclan, un huis-clos où des jeunes se font méthodiquement tuer au fusil.
Si ce roman est un page-turner, c'est surtout parce qu'on a envie de mettre fin le plus vite possible au supplice que représente sa lecture !
Parution en poche le 17 août 2023
chez 10/18
624 pages / 10,10€
Traduction (japonais) Diane Durocher
Vacances la tête en l’air avec Miyazaki
Les Juillettistes ont battu les aoûtiens ! Depuis fin juillet, la pluie et les orages ont gâché les fêtes de campings, les bals de villages et les journées à la plage. Mais avez-vous profité de ce temps variable pour regarder les nuages ?
C’est la plus belle sensation de vacances. Dans nos villes étriquées, voir un gros cumulus se rouler dessus c’est un magnifique spectacle. Observer un ciel avec des petits moutons gris c’est beau. Et que dire des derniers rayons de soleil qui viennent colorer les nuages qui annoncent la tempête ou le beau temps ?
Au cinéma, le ciel est aussi une œuvre à part entière. Et celui qui le regarde avec gourmandise et l’anime avec beauté, c’est bel et bien Miyazaki, maître du cinéma d’animation japonais. Tous ses films se regardent en levant la tête vers les cieux.
Deutsch Grammophon le souligne très bien en convoquant le fameux Royal Philamornic Orchestra pour un disque hommage au complice de toujours de Miyazaki, Joe Hisaishi. C’est bien lui qui amène notre envie de se perdre sur les chorégraphies des nuages et ce que suggère la pochette sobre de cet album symphonique.
Il s’agit donc d’une compilation des tubes du Studio Ghilbi. L’orchestration enroule toutes les caresses de cette musique veloutée. En version anglaise : cela ne gâche jamais la rondeur céleste que cette écriture picturale et inspirante. Bien entendu, il n’y a rien de nouveau dans cette prestigieuse adaptation mais cela reste un appel à la rêverie, à la beauté simple et à un hédonisme élégant.
Puisque ce sont les grandes vacances, poussons le plaisir un peu plus loin ! Fixez le ciel bleu et regardez les petites traces blanches ou les nébuleux cumulonimbus. Écoutez la musique du Château Ambulant.
Une valse d’une heure qui va bien aux divagations et à la poésie d’une nature libre et espiègle. Un piano viendra calmer et rythmer les ardeurs en offrant une mélancolie qui fait du bien au cœur.
Car c’est ce que l’on aime chez Joe Hisaishi. Il y a la performance mais il y a surtout l’absolue tendresse. L’humanité du cinéaste Miyazaki trouve une réponse touchante dans cette capricieuse orchestration qui ne vous lâchera jamais. Promenez vous dans la nature. Observez cette limite ou le vert des forêts vient caresser le bleu ou le banc du ciel… vous verrez. Vous entendrez. Je vous le souhaite : vous vibrerez !
D’ailleurs c’est en ce moment la nuit des étoiles. Ce moment où les étoiles filantes se donnent en spectacle. On peut même voir le train Starlink d’Elon Musk se promener dans la voie lactée… Pour oublier ce cynisme, offrez vous la dolce vita de Porco Rosso.
Là encore vous aurez droit à un festival de notes festives et de mélodies séraphiques. Tout ce qu’il faut pour avoir la tête dans les nuages. Soyez heureux les aoûtiens !
Le film raconte un cochon qui pilote dans l’Adriatique, entre terre et mer. La musique fanfaronne et nous fait voyager dans un monde onirique et d’une légèreté inouïe. Les harmonies nous font découper géographiquement les bordures méditerranéennes si délicieuses et nous emporte dans un vent de mélodies rustiques et rêveuses.
Cet article est écrit depuis la cité mais les rythmes de tous ces titres vous entraineront vers le farniente absolu, la chimère harmonieuse ou l’envie d’ailleurs… Le nuage est votre meilleur ami qu’il fasse beau ou moche!
Oppenheimer, Christopher Nolan, Universal
On le sait: regarder un film de Christopher Nolan est une épreuve et bien souvent une fresque avec ses bizarreries et ses obsessions. Pour une fois, il réalise un biopic classique… à sa manière.
Nous saurons donc tout sur le professeur Oppenheimer, le père de la bombe atomique. Très vite, on comprendra que l’homme est aussi mystérieux que l’atome qu’il tente de percuter à des neutrons tout aussi abstraits.
L’abstraction est justement l’une des grandes passions du cinéaste d’Interstellar. Cela a donné des grands films, de beaux succès et quelques nanars célestes aussi. Cette fois-ci, cela colle parfaitement à l’esprit surélevé de Oppenheimer.
On s’arrête ici pour saluer l’interprétation de Cillian Murphy, acteur fétiche de Nolan. Son regard perçant est un fil auquel on s’attache pour saisir la folie qui habite ce drôle de scientifique, qui a du mal à résister au pouvoir. Celui de la fission et de la fusion. Celui de la politique. Celui de la guerre.
L’acteur est extraordinaire. Il est très bien aidé par des dialogues complexes et parfois drôles. Nolan a la bonne idée de le faire travailler avec toute une bande qui se réjouit de la richesse verbale d’un biopic bouillant comme un noyau. On reconnait plein de visages connus mais on appréciera l’humour cynique et taciturne de Matt Damon et l’imitation de Jeremy Irons par Robert Downey Jr.
Mais revenons au spectacle proposé. Car c’est une fresque intime mais épique dans sa narration. C’est ce que l’on aime ou déteste chez Christopher Nolan. Rien n’est simple. Comme d’habitude, le réalisateur explose la linéarité de son récit mais le montage fait monter un suspense que l’on n’imaginait pas.
La musique devient un mur sensoriel qui nous enferme dans l’obsessionnelle quête d’Oppenheimer. Les enjeux de l’histoire s'imbriquent dans les ambivalences du personnage, condamné à réaliser un événement sans précédent.
Il y a donc le coté sentencieux du cinéma de Nolan mais il y a surtout une vraie pertinence dans le propos. Ce n’est pas un héros sympathique mais un portrait entier d’un physicien étonnant. Nolan sait filmer ses intuitions, ses faiblesses et son humanité. Le rêve d’un homme peut-il devenir le cauchemar du Monde ?
Tous les dilemmes sont montrés. C’est parfois énorme mais cela va très bien au sujet. La folie des grandeurs se développe à l’écran avec une ampleur qui finit par nous subjuguer. On peut se sentir manipulé : on admire le côté monumental de l’entreprise.
Avec le temps, cela pourrait donner un film ampoulé mais Nolan sait toujours faire une œuvre fascinante, qui nous pousse à aller un peu plus loin et offrir un cinéma qui interroge… il parvient à nous faire rêver d’une manière ou d’une autre.
Avec Cillian Murphy, Robert Downey Jr, Emily Blunt et Florence Pugh
Universal - 3h01
Rendez-vous à Tokyo, Daigo Matsui, Art House
Elle conduit un taxi. Il danse. Ils sont amoureux mais leur histoire est racontée avec une idée simple et malicieuse. Une comédie sentimentale qui oublie toute niaiserie et s'aventure vers de vraies émotions. Prenez rendez vous !
Le réalisateur Daigo Matsui n'en est pas à son coup d'essai. Mais Rendez-vous à Tokyo est son premier film distribué chez nous : à la fin de la projection on serait curieux de voir les précédentes œuvres du cinéaste japonais.
Rendez-vous à Tokyo se passe le même jour de l'année dans la vie d'un couple. Un drôle de couple d'ailleurs. Yo roule dans les rues sinueuses de la capitale. Elle observe tout un tas de clients plus ou moins pittoresques.
Teruo est un ancien danseur. Blessé, il a dû se repenser. Il cache mal un certain spleen. Le 26 juillet en particulier. Car c'est une date importante pour le couple. Elle signifie beaucoup. De leur rencontre jusqu'à leur rupture.
Parce que le cinéaste va profiter de cette date anniversaire pour nous faire valser entre leurs sentiments. Avec des clins d'œil délicieux à Jim Jarmusch, il nous fait visiter une ville qui va vite se charger d'émotions.
Il a bien retenu la leçon du cinéaste américain en faisant de la ville, des décors, un vrai élément de tension, de joie ou de plaisir. Une fois le procédé de narration découvert, le film offre une danse sur la passion ordinaire... mais si riche et si douloureuse.
Pourtant il n'y a rien de pathétique dans ce couple qui fait tout pour s'aimer au-delà du quotidien. La sobre mise en scène permet aussi de sentir leur enthousiasme et leur vertige. Petit à petit apparaît une élégance subtile. Les comédiens y sont pour beaucoup. La mélancolie est ici bourrée d'énergie. Et c'est la force de ce film qui rend le spectateur terriblement vivant.
C'est une œuvre qui fait battre le cœur. C'est assez rare. Donc absolument précieux!
Avec Sosuke Ikematsu, Sairi Ito, Jun Kunimura et Yumi Kawai
Art House - 1h50
L’Annonce faite à Goering, Jean-Pierre Cabanes, Albin Michel
L’auteur, qui n’est pas qu’écrivain mais occupe également la fonction d’avocat honoraire, est connu pour une grande fresque, Rhapsodie italienne.
Auteur prolifique, il a aussi reçu le Grand Prix de la littérature policière.
L’annonce faite à Goering est avant tout une fresque, haletante et belle, qui traverse la Seconde guerre mondiale, en France, en Italie et en Allemagne.
Il y a quelque chose d’extrêmement fort dans cet ouvrage, qui nous entraîne au gré des vies qui se croisent : les gens qui s’aiment, ceux qui n’aiment pas ou n’aiment rien et profitent de tout. Les calmes et les brutaux (comme les terribles gestapistes français de la rue Lauriston). Sans oublier ceux qui meurent trop tôt. Il y a la peur et l’incrédulité, le cynisme et la volonté, la vie qui continue envers et contre tout.
Le personnage principal, c’est Werner, étudiant allemand en histoire de l’art à Paris, spécialiste des faux en peinture. Werner deviendra militaire, gagnera des galons vaillamment et s’accrochera coûte que coûte à la vie.
Son amour parisien, Claire, est juive mais Werner fait tout pour les aider, elle et ses parents marchands d’art qui ne peuvent croire qu’ils sont mis au ban de la société.
D’autres personnages gravitent autour du jeune homme : sa sœur, Hildi, l’amant de cette dernière, et Lisbeth. Ils semblent toutefois un peu trop nombreux et, de Galeazzo à Edda en passant par Ornella et Van Meegeren, on s’y perd réellement.
Mais l’histoire nous emporte quand-même, surtout que l’auteur a une vraie connaissance des sinistres protagonistes de l’époque et de leurs univers ainsi que de leurs traits de caractère, particulièrement en ce qui concerne Goering, Luchaire et Goebbels.
Leur entourage n’est pas non plus épargné.
Le tout est narré de manière alerte, précise, d’une écriture fluide. On s’y laisse prendre dès la première page, avec un sentiment de tristesse à la fin, comme un abandon. Une belle histoire.
Paru le 31 mai 2023
Éditions Albin Michel
380 pages / 22,90 €
En eaux très troubles, Jason Statham, Warner Bros
Jason Statham se bastonne avec des requins préhistoriques, une pieuvre géante et un moustachu mexicain... bienvenue dans un océan de conneries!
Mais honnêtement c'est de la bonne connerie. Celle que l'on digère parfaitement bien l'été lorsque l'on va au cinéma pour la climatisation ; ce film est un grand courant d'air pour neurones !
Comme souvent avec les œuvres de cette grosse barrique de Jason Statham, héritier maladroit mais sincère de Chuck Norris ou Sylvester Stallone. Le comédien est payé à la tatane dans la tronche et aux dialogues ruminés. Ça semble le combler de joie. Sa façon de non jouer est un spectacle assez jubilatoire en soi. Il faut avouer que votre serviteur a des plaisirs déviants au cinéma.
D'ailleurs cette suite totalement inutile pille allégrement le fond de commerce de la société de production The Asylum. Si vous ne connaissez pas, n'hésitez pas à regarder un de leurs films. Du gros nanar sans sou mal fichu mais qui aime mettre en scène des histoires aussi débiles que totalement farfelues. Leur plus grand succès: Sharknado et des requins qui se déplacent dans des tornades... bah oui!
Pour fêter ses 100 ans, la Warner a donc mis le paquet sur cette histoire de mégalodons qui se libèrent des abysses pour avaler du touriste abruti. Mais comme c'est un peu court comme programme, Jason Statham devient un éco-guerrier qui se bat contre des méchants avides de polluer les fonds marins et amasser des dollars jusqu'à la fin du Monde. L'empilement de stéréotypes échaudés et l'accumulation d'aberrations scénaristiques font d'En Eaux Très Troubles un nanar aussi intelligent qu'une crevette sans tête !
Il ne faut pas bouder son plaisir : on sait ce que l'on va voir. Le mérite des auteurs : avoir dépassé les bornes en termes de stupidité évidente, de raccourcis interdits depuis des lustres dans le 7e art, et de production bâclée à force de tequila et de rhums arrangés sur le tournage. On ne voit que cela pour justifier un tel spectacle !
Ce n'est pas En Eaux Troubles, mais En Roue Libre !
Avec Jason Statham, Wu Jing, Cliff Curtis et Page Kennedy...
et des requins aussi inexpressifs que les acteurs !
Warner Bros - 1h50
Des jours meilleurs, Jess Walter, 10/18
Une saga fraternelle, un roman passionnant sur les luttes syndicales des États-Unis du tout début du XXème siècle.
Jess Walter est né et vit à Spokane (État de Washington) ; il était donc bien placé pour écluser la bibliothèque locale et compiler en roman les articles de journaux de l'époque consacrés aux luttes syndicales qui se déroulèrent dans sa ville en 1909.
Il faut imaginer un monde où les travailleurs n'ont aucun droit et où la violence et la trahison sont reines. Une jungle où "Tout le monde est prêt à faire n'importe quoi pour un peu d'argent" (page 252) et où chacun lutte avec ses propres moyens avec pour ambition de changer le monde ou, plus modestement, de s'y faire une place confortable.
Deux frères. L'ainé, Gig, est un beau parleur séduisant et idéaliste qui passe son temps aux IWW (les Industrial Workers of the World), un syndicat ouvert à toutes et tous. Son petit frère Rye, 16 ans, est lassé de la vie de hobo et rêve de stabilité. Mais sa vie sera quelque peu bousculée lorsqu'il croisera le chemin d'Elizabeth Gurley Flynn, une militante syndicale de 19 ans au culot impressionnant (qui fondera plus tard le Parti Communiste Américain) . J'avoue humblement n'avoir jamais entendu parler d'Elizabeth Gurley Flynn avant de lire ce livre. C'est pourtant une figure historique dont la vie mériterait d'être enseignée à l'école. Un personnage bien réel, comme la plupart des protagonistes de ce livre.
Jess Walter fait évoluer ces deux frères de fiction au sein d'une révolte de travailleurs pauvres réprimée dans la plus grande violence par la police de Spokane en 1909. Des événements assez incroyables pour être vrais, car Jess Walter illustre parfaitement l'aphorisme d'Albert Camus (cité page 471 du livre) selon lequel "La fiction est le mensonge dans lequel nous disons la vérité. "
Ce n'est certes pas le roman le plus original qui soit, mais il est très efficace et je l'ai lu avec plaisir et intérêt. Tout au long du livre se pose la question de l'utilité du combat syndical. N'est-il pas perdu d'avance ? Les travailleurs ont-ils vraiment une chance de faire valoir leurs droits face à ceux qui les exploitent et accaparent éhontément les richesses ?
Ce livre nous rappelle avec à-propos la redoutable actualité de la défense des libertés et des droits fondamentaux. Car en filigrane, Jess Walter parle avec acuité de notre siècle qui est le digne héritier du précédent.
"Aujourd’hui nos poissons ont disparu (...). A cause de leurs foutus barrages. Maintenant, dans notre rivière, il n'y a plus que de la merde, des ordures et les déchets des mines. Sur terre, ils ont fait fuir tout le gibier avec leurs marteaux et leurs scies, ils ont arraché les baies dans les collines pour construire encore plus de maisons. Ils ont tué le monde et ils ont appelé ça "progrès" " (page 110)
Paru en poche le 15 juin 2023
chez 10/18 collection Littérature étrangère
480 pages / 9,60€
Traduction (anglais américain) Jean Esch
Faites vous un film dans votre tête !
Vous avez trop chaud ? Filez au cinéma les amis ! Ça détend. La climatisation fera son effet, et rien de mieux qu’une petite fiction pour mettre les coups de soleil de côté. Et en plus, on peut sortir de là avec des petits airs dans la tête. Voici donc trois disques qui vont vous offrir des thèmes particulièrement entêtants.
On commence d’ailleurs avec le disque le plus important de l’année : le dernier Indiana Jones composé par John Williams. A 92 ans, le compositeur a décidé de signer une toute dernière bande originale.
Et cela se ressent dans cette œuvre qui ne dépassera jamais l’explosion lyrique des trois premiers épisodes : elle est presque mélancolique. On n’oubliera pas de sitôt les toutes dernières notes de l’album d’une douceur presque amère.
Mais le maître fait de son mieux pour rythmer les nouvelles aventures d’Indiana Jones. Ce n’est jamais emphatique mais le complice de Steven Spielberg recycle habilement toute la mythologie mélodique de la fameuse saga.
Une fois de plus, il y a dans son écriture une sorte de romanesque qui nous emporte dans une folle imagination. C’est ce qu’on aime le plus chez Williams : ce pouvoir d’évocation. Vintage, nostalgique, cette dernière composition rend presque triste parce que c’est la toute dernière de John Williams, personnage clef de la musique américaine et de la bande originale de film.
Plus joyeuse mais avec ce même goût du recyclage, on peut tirer un coup de chapeau au fade Brian Tyler qui a réussi symphoniser les thèmes de Super Mario Bros pour les besoins du film d'animation qui a cartonné au cinéma.
Brian Tyler, c’est le compositeur de série B par excellence. Il produit du son plutôt que de créer des univers musicaux. C’est un pisse copie d’Hollywood comme il y en a tant mais lui, a eu la chance de lier son nom à quelques succès au box office.
Mais il faut avouer que le quinquagénaire a fait de gros progrès en se confrontant à l’univers du fameux petit plombier de Nintendo. Il doit sûrement être fan quand on voit la débauche d’efforts et de thèmes qu’il reprend et malaxe avec une certaine dextérité.
C’est la première fois dans sa grande filmographie que l’on découvre ce sentiment: l’enthousiasme. C’est peut être un peu trop excité à certains passages, mais la musique de Super Mario Bros est une réussite en faisant référence à tout le passé de la franchise Mario et enveloppant le tout avec une orchestration impressionnante et qui ne se laisse pas aller à la facilité. C’est une espèce de montagne russe de mélodies: on ne va pas se plaindre à l’époque du sound design si cher à Hans Zimmer ou Christopher Nolan. Ici, il y a du cœur et un véritable orchestre en extase devant l’énergie de la composition. Une belle surprise.
Tout comme la dernière bande son du dernier Mission Impossible. Là encore, on retrouve un musicien face à un monument sonore et doit faire face à toute une mythologie bien réglée. Comme pour les précédents disques cités, on devine un cahier des charges imposant et le compositeur doit comme il peut s’adapter. Lorne Balfe n’a peut être pas les épaules pour imposer ses épaules à Tom Cruise et sa saga trompe la mort mais il faut avouer que pour son deuxième essai, sa bande originale a le grand mérite de surprendre.
L’Écossais réussit l'exploit de s’installer comme un vrai cascadeur sur une ligne de crête entre entre sound design et vraie musique immersive. Sur presque deux heures, Lorne Balfe met donc le thème de légende sous stéroïdes avec des idées modernes mais aussi un classicisme qui intervient de la plus belle des manières.
C’est la bande originale bien tendue et si vous faites des balades en montagnes ou des treks en tout genre vous pourrez vous prendre pour un aventurier, un plombier ou un espion… La vie rêvée des vacanciers peut passer par ce genre d’idée: de la BO pour s’évader en grand!
Exposition Ramsès & l’or des Pharaons, Grande Halle de la Villette
L'exposition Ramsès & l'or des Pharaons, depuis le 7 avril 2023 à la Grande Halle de la Villette, est prolongée jusqu'en septembre. Dépêchez-vous de ne pas y aller !
Je vous le dis franchement, les pharaons, moi je ne comprends pas. Je n'aime pas ni l'art pictural kitsch ni les tombeaux mégalos des égyptiens. Et puis, des mecs qui adoraient les chats ? Franchement !
Mais bon, pression sociale et marketing agressif obligent, ma fille de neuf ans a entendu parler de cette exposition sur l'Égypte antique à Paris, et j'ai voulu lui faire plaisir. Nous voilà partis pour la Grande Halle de la Villette.
A l'intérieur, les salles sont vastes afin d'accueillir un maximum de gogos... euh, de visiteurs. Le tarif est de 26€ par adulte et de 22€ par enfant, à partir de 4 ans, il n'y a pas de petits profits. Et si vous souhaitez imprimer vos billets, il vous faudra ajouter 1,50€ pour les frais (quels frais ? on se le demande puisque c'est mon imprimante qui tourne !).
Grandes sont les salles donc, mais petite est la collection d'objets présentés.
Pour faire diversion, les organisateurs ont recours à quelques vieux trucs. Tout d'abord, ils mêlent aux antiquités des éléments de décors en carton-pâte. C'est tellement moche qu'on se croirait dans la fille d'attente du manège Oziris du Parc Astérix.
Ils multiplient également les photos et les films (avec des animations bas de gamme à la clef).
Ensuite, ils cherchent à créer un suspens assez bidon sur le thème Est-ce que le cercueil de Ramsès II a été retrouvé ? A votre avis ? Réponse dans la dernière salle de l'exposition, aussi décevante que le reste.
Enfin, clou du spectacle et moyennant un supplément tarifaire de 20€ par personne, "L’exposition propose au visiteurs une expérience de réalité virtuelle immersive présentant les monuments sans doute les plus impressionnants de Ramsès II : les temples d’Abou Simbel et la tombe de la reine Néfertari. Le fantôme de celle-ci accueillera le visiteur et l’entraînera à travers une aventure palpitante".
L'exposition Ramsès & l'or des Pharaons aurait pu s'appeler "l'Exposition Ramsès & les c... en or de ses organisateurs " !
PS: l'avis de ma fille sur l'expo : "J'avais envie de voir l'expo parce qu'ils en avaient parlé dans Salut l'info et qu'ils disaient qu'il ne fallait pas rater la dernière salle de l'expo sinon on risquait de manquer quelque chose. J'ai cherché, en vain, et j'ai été déçue ! Je pensais que c'était mieux que ça."
Expo Ramsès
Grande Halle de la Villette, Paris 19ème
TP 26€ | TR 20€
le son des vacances : Nils Lofgren, Julie Byrne, Faut que ça guinche au stand d’escargot !
Bon. Nous sommes en vacances. On est parmi la masse de personnes qui ne veulent plus rien faire pendant trois semaines minimum. On veut bien faire un effort pour la fête du village, la brocante des gentianes ou la vente de vêtements en laine de lama. Moi, j’avoue beaucoup aimé le petit stand de dégustation d'escargots !
Quand on en est là généralement, cela veut dire que la tête est enfin bien aérée ! En fait, cela fait du bien de papoter de menus problèmes avec des gens que l’on ne connait que depuis quelques instants parce que l’on reluquait ensemble cette compotine d’escargots au pesto !
Souvent on se dit c’est si simple. Le plaisir d’un échange sans fioriture. L’humilité, ce n’est pas si mal. Je pense que je pourrais partager quelques gastéropodes avec Nils Lofgren. Il faut dire que le musicien a toujours été à l’ombre des géants et chez lui, le succès a surtout renforcé sa discrétion. Et son talent !
Complice de Neil Young, mais aussi de Bruce Springsteen, Nils Lofgren a aussi réalisé pas mal d’albums et, toujours, avec une solide conviction d’un folk rock boisé et très classique. Ce qui n’est pas forcément un mal. Autour de sa petite dégustation de rock, on reconnait des têtes comme Ringo Starr, Ron Carter ou le regretté David Crosby. Et bien entendu le Loner.
Ça n’empêche pas ses propres compositions d’exister. En effet l’air de la montagne inspire le chanteur, ravi de continuer un rock flamboyant et pourtant presque timide. Pour la surprise, il faudra repasser. Pour le plaisir, installez vous à sa table et appréciez la sagesse tranquille d’un fin gourmet de la guitare.
A mon stand d’escargots à déguster sous toutes ses formes, vous trouverez aussi la nymphette qui va attraper la bête du bout des doigts. Elle aura peut être le charme de Julie Byrne, nouvelle sensation de la folk pour médias en mal de Lana del Rey.
C’est en fait une petite nana du terroir mais elle a aussi tout compris des réseaux sociaux. Moderne et folklorique en même temps. Elle plaira facilement à tout le monde avec une voix claire mais androgyne.
En allant chercher le producteur de Sigur Ros, la jeune femme soigne l’ambiance et l’idée d’expérience. Effectivement il y a du violon qui berce et un ton qui fait réfléchir mais tout ça dans une ambiance estivale quasi mélancolique.
The Greater Wings sort au bon moment. La tristesse devient mélodique et les arrangements sont beaucoup plus rafraîchissants que le spleen apparent. Julie Byrne a tout de l’amour d’été. Mais ce n’est pas gagné avec une haleine d’escargots à l’ail !
Ok, ça ne dérangera pas les Grenoblois de Faut que ça guinche. Ils animeront certainement la fête du village mais en attendant, ils ne seront pas contre une pincée de beurre d’escargots persillés pour faire passer le goût de la bière brassée à la langue de chèvre…
Avec eux, le bon goût est catapulté tout en haut d’une montagne. La nymphette sera draguée lourdement et un clin d’œil complice fera taire le vieux sage qui a connu les plus grands. Avec un culot de punk, les amis de Faut que ça guinche grattent l'amitié avec la délicatesse d’un mec bourré mais aussi le talent de musiciens ouverts sur le Monde.
Version alpine de Marcel et son Orchestre, les six zouaves savent faire tourner le sens du vent en leur faveur : leur musique est festive mais cache pas mal de nuances qui apparaissent au fil des écoutes.
Les bourrins ont toujours une conscience et l’énergie du groupe gagne les cœurs. Il y a une espèce de candeur juvénile dans leurs titres enjoués. Ça milite avec un sens du partage assez rassurant. Ça fait les cons avec une complicité qui fait tellement du bien à entendre.
Ils mettent une ambiance incroyable et surtout amusent à choquer le bourgeois avec une vieille formule qui conserve son charme et un humour vachard. Ils ont peut être saccagés mon stand d’escargots mais ils ont le mérite de nous réveiller de cette torpeur estivale !
Nils Lofgren - Mountains
Julie Byrne - The Greater Wings
Faut que ca Guinche - 6e Sens