Late Knight Special

Des emprunts au jazz, une ambiance noctambule, il y a plein de bonnes choses dans le premier disque du rappeur east coast. Très spécial.

Il vient de Brooklyn. Il devrait nous jouer le jeu du Wu Tang Clan ou déconner comme les Beastie Boys, mais le jeune Kirk Knight récite les évidences du rap avec sa propre idée du rap. C'est une révolution. Faudra revenir pour entendre le gros beat et le gros flow qui fait mal comme tirs en pleine rue.

Kirk Knight parle bien entendu de la rue. Sa violence. Sa beauté. Ses fleurs de bitume et ses rois de la descente aux enfers. Son disque est un bulletin d'information. Un état des lieux. Il ne laisse pas indifférent car le jeune homme voit les choses différemment.

Copain du rappeur Joey Bada$$, Kirk Knight sait utiliser un ton martial mais il peut aussi nuancer son rap avec une musicalité assez rare dans le genre. Plein d'invités, il y a dans son disque mais le disque file à toute vitesse à travers ce rap urbain, sombre mais jamais nihiliste. Car musique offre du plaisir. Dans ses boucles et ses beats, Kirk Knght se révèle être un habile producteur aux arrangements astucieux, rappelant le meilleur de MF Doom ou Madlib.

Il y a une mélancolie jazzy extrêmement harmonieuse sur tout l'ensemble de l'effort. Il joue les badboys mais pas que! Le rappeur est un vrai metteur en scène. Le bonhomme observe avec un recul artistique son district, son quotidien et surtout ses contemporains.

Finalement ses états d'âme nous emmènent sur des morceaux hétéroclites mais en même temps cohérents, les uns avec les autres. On pourrait envisager une version moderne de Mean Streets de Scorsese. Ca cogne fort mais il y a des valeurs. Ce type là ne joue pas un rôle. Son ambition impressionne et ce disque est un bijou noir comme on en voit peu.

Cinematic - 2015

Lolo

Julie Delpy fait dans la comédie populaire! Une bonne idée pour un film moins rigolo qu'il n'y parait!

C'est le petit plus de la nouvelle comédie de l'actrice réalisatrice Julie Delpy: son film est cruel. Beaucoup plus que le norme d'aujourd'hui. Elle pourrait se comparer à l'humour vachement acide de Chatiliez et ses contes moraux, drôles et populaires.

On pense d'ailleurs à Tanguy avec ce drôle d'adulte qu'est Lolo. Un enfant roi qui ne veut pas quitter sa mère, parisienne jusqu'au bout des doigts. Il voit donc débouler sur la Capitale, Jean René de Biarritz. Informaticien doué, il est le nouveau petit ami de Violette, la maman qui travaille dans la mode et qui doit gérer les ambitions artistiques d'Eloi, dit Lolo.

Le trio n'est donc pas très bien accordé mais la partition n'en sera que meilleure. Car Julie Delpy n'a pas froid aux yeux pour décrire les supposés préjugés entre les Parisiens et le reste de la France. Avec Karin Viard, elle forme un duo aussi insupportable qu'hilarant de quadras en mal d'amour, de cul et de tendresse!

Vincent Lacoste est la plus belle tête à claques que l'on est vu au cinéma. Sa répartie, son cynisme et ses idées tordues donnent à voir le pire du parisianisme souvent décrié. Les clichés pleuvent aussi sur la "Province" mais Delpy montre un certain réalisme dans une comédie française: autant vous dire que c'est rare pour être signalé!

Son expérience américaine a peut être amené sa singularité mais le parcours de cette réalisatrice est intéressant car elle touche à tout et le fait avec une fausse désinvolture qui révèle une personnalité assez aventureuse. En tout cas son film est un portrait acerbe de la culture française. Ca n'évite pas deux ou trois situations un peu too much mais, même avec Dany Boon en roue libre, les nuances ont le droit de citer dans Lolo. On est pas dans le comique pour public abruti par la TNT.

Sur la bêtise, sur la famille, sur le choc des générations, le film cache pas mal d'amertume derrière des dialogues croustillants et des comédiens ravis de jouer avec les stéréotypes. Ca rigole beaucoup mais ca ne dit pas que des banalités. Une comédie plus fine que d'habitude. On l'adopte ce Lolo!

Avec Julie Delpy, Dany Boon, Vincent Lacoste et Karin Viard - Mars distribution - 28 octobre 2015 - 1h35

Sundogs

Haaaaa... la Belgique, c'est bel et bien là que tout se passe sur le vieux continent!

En matière de rock et de pop, les propositions les plus alléchantes ont généralement un gros accent en français, une forte odeur de frites et une passion pour la bande dessinée. Vous apprécierez ces clichés à leur juste mesure mais ils noient le poisson: les Belges sont des sacrés amateurs de rock! Des excellents musiciens.

Depuis quelques années, à ce niveau, ils nous épatent. Nous, on n'a pas grand chose à se mettre sous la dent. Chez eux, il y a bien sûr le succès mondial de Stromae mais il y a eu tout un tas de découvertes qui ont poussé les décibels au delà des petites frontières belges: Deus, Puggy, Girsl in Hawaii, Balthazar... on en a toute une caisse!

Great Mountain Fire n'est pas un groupe de hippy californiens, usés par le soleil et les stupéfiants: il s'agit d'un groupe de Bruxelles, défenseur d'une pop aérienne, capricieuse et jubilatoire. C'est léger mais en écoutant bien, les harmonies et les mélodies sont complexes et passionnantes.

A la surface on entendra des refrains qui chatouillent. Il y a des parties plus psychédéliques mais ils ne s'étirent pas inutilement pour épater l'auditeur. En bon belge qui se respecte, ils connaissent bien la science du rock et appliquent des formules souvent simples mais toujours magiques. Effectivement leur joyeuse pochette résume assez bien leurs efforts: une visite en apnée dans un rock (avec une pointe de funk) dénué de cynisme mais savamment calculé! Ca fait du bien au moral: c'est sûrement le feel good album de l'automne!

On rentre dans le terrible et froid mois de Novembre: ce disque vous propose la Belgique comme destination. C'est très loin d'être une aberration. On vous conseille vivement de découvrir cette petite douceur belge!

PIAS - 2015

Courting the Squall

Echappé de son formidable groupe anglais, Elbow, le chanteur Guy Garvey profite d'un premier album pour se laisser aller à ses petits plaisirs personnels. Une louable intention.

On ne doutait pas qu'il était un homme de goût. Avec sa tronche de barbu bourgeois britannique et sa voix d'une profondeur assez rare dans la pop, Guy Garvey dénote très facilement au pays des lads, de la radasse en mini jupe bourrée sous la pluie et du fish & chips arrosé de bière tiède. Avec Elbow, on touche à la noblesse de la musique anglais. Sans préjugé, le son d'Elbow est excellent.

Pourtant Guy Garvey avait besoin de s'émanciper. Comme souvent, il a l'ego un peu trop coincé dans la machine Elbow, capable en low tempo de faire bouger les foules de l'autre coté de la Manche. Comme toujours avec Elbow, le calme cache une petite tempête.

Donc le capitaine quitte le navire quelques instants pour réaliser un rêve plus personnel, sans hymne pour stade, mais toujours avec inspiration. Guy Garvey se projète donc dans des mondes différents. Il fait du jazz, du rock de crooner, de la pop et des choses encore plus "indés".

Il se voit bien comme un disciple de Tom Waits, oscillant entre la tradition et l'expérimental. Ce qui est sûr, c'est que le plaisir est là et surtout il ne plie jamais à des conventions commerciales. C'est un disque assez éclaté. Il peut paraître foutraque, uniquement relié par la voix éraillée et souvent formidable.

Il conserve en tout cas ce pouvoir de séduction: chaloupé, le charisme du bonhomme est rassurant. On veut bien tester ses nouvelles aventures sans se faire de souci. Il transmet sa joie de toucher à autre chose. C'est un disque chaleureux, bariolé mais tellement humain. Une envie de liberté qui ne marquera pas, on espère, la fin de l'un des meilleurs groupes anglais en activité!

Polydor - 2015

Avril et le Monde Truqué

Jacques Tardi au dessin! Le Studio Ghibli comme influence! Avril et le Monde Truqué a de quoi séduire. Hélas, la mécanique n'est pas si finement huilée!?

Il y a quelque chose qui cloche dans ce dessin animé ambitieux. Produit entre la Belgique et la France, ce long métrage d'animation impressionne par sa conviction, son originalité et ses références. le film est un pur plaisir d'uchronie.

Vous savez cette drôle de science qui consiste à imaginer un autre Monde avec une autre Histoire. Dans ce cas là, imaginons un monde qui serait toujours au charbon et la vapeur. Les grandes révolutions industrielles du 19e Siècle, on les envoie aux oubliettes. La Belle époque est finalement assez moche. Les arbres ont disparu. La suie est partout dans les rues de la capitale. Il faut prendre un périphérique pour aller à Berlin en 82 heures. Un monde pas très joyeux.

Tout cela à cause de Napoléon 3, mort lors d'une expérience scientifique pour le moins déroutante. En tout cas, les savants disparaissent depuis, les uns après les autres. La famille Franklin, scientifiques de père en fille, n'est pas épargnée. La petite Avril voit ses parents agresser par la police et des événements plus étranges.

Abandonnée, elle tente de retrouver son grand père mais aussi une formule qui permettrait aux hommes de devenir invulnérables... évidemment cela aiguise les appétits de plusieurs machiavéliques personnages. Et c'est parti pour une course poursuite dans un Paris des années 30, fantasmé qui rappelle les délires mécaniques du grand Miyazaki ou les folies à vapeur de Steamboy, chef d'oeuvre mésestimé de Katsuhiro Otomo.

Mais le Japon ne reste qu'une référence car tout le graphisme est basé sur les oeuvres de Jacques Tardi. Le film est un magnifique hommage, en oubliant d'être un récit passionnant. On décroche à plusieurs moments même si le dessin reste une vraie réussite. On retrouve tout le charme de l'auteur des aventures d'Adèle Blanc-sec.

Le coté rétro fonctionne à plein régime. Les rues de Paris se visitent avec gourmandise. Le film se sert parfaitement du talent de l'artiste. Hélas, le scénario peine à convaincre, se fourvoyant vers un final écolo un poil ridicule. On voudrait rêver mais on finit par un peu somnoler. C'est dommage car une fois encore, c'est un film d'animation qui ose, s'invente en permanence et propose de la nouveauté.

Pour les films, les compositeurs de cinéma ont fait dans la déférence polie, osant à peine toucher au thème qui fait la marque de fabrique. Danny Elfman, Hans Zimmer et Michael Giacchino laissent la place au discret et talentueux Joe Kraemer.

Il s'agit du petit protégé de Christopher McQuarrie, le réalisateur du film. Kraemer a écrit les musiques des trois films de McQuarrie dont Jack Reacher déjà avec Tom Cruise. Autrement il travaille plutôt sur des petits films. Avec son budget de 150 millions de dollars, le plaisir de voit les choses en grand sont évidentes dans l'écriture de Joe Kraemer.

A l'époque du "sound design", la musique de ce Mission Impossible est donc ample, généreuse et vous remplit les oreilles de mille et une notes avec un grand orchestre. Les ruptures du rythme sont nombreuses et proposent un grand huit qui pourtant ne fait pas dans les excès pompiers.

Le thème est joyeusement décliné. Visiblement l'artiste est inspiré par le travail de Lalo Schifrin, qui devrait être rassuré par cette nouvelle et excellente partition. Une musique qui donne l'envie de se déguiser, se faire passer pour quelqu'un d'autre, jouer aux espions... quoi! La mission de Kraemer est remplie!

La la Land import - 2015

Autumn songs: Autumn Changes

The Hollywood Vampires

La grande histoire du rock'n'roll se rappellera peut être du Hollywood Vampires, réunion de soulographes, adeptes de la musique et des joyeux délires en tout genre!

Dans les années 70, Alice Cooper fonde pour rigoler, un club pour stars du rock et fans de la boisson, The Hollywood Vampires. La bonne blague de comptoir s'adresse à des personnalités commme John Lennon, Keith Moon ou Bernie Taupin. Des décennies plus tard, Cooper raconte cette petite mésaventure à son ami Johnny Depp.

Fasciné par les héros du rock, le comédien, gratteux à l'occasion, se propose de faire renaître l'institution noctambule sous la forme d'un groupe réunissant le grattin de ce rock imbibé et décimé aussi, il faut l'avouer. Alice Cooper redevient le président d'honneur des Hollywood Vampires, accompagné du guitariste d'Aerosmith, Joe Perry.

Le trio ouvre son carnet d'adresses pour inviter des amis à jouer des vieux morceaux des années 70, qui ont fait la renommée d'artistes tragiquement disparus! On ne manque pas d'humour noir chez les Hollywood Vampires. On reprend donc les Doors, T.Rex ou les Who.

Le trio ne manque pas d'énergie malgré l'âge et les excès. Ils sont accompagnés par des copains pas comme les autres. On entend une bonne partie des Guns (Slash, McKagan et Sorum). Dave Grohl apporte sa touche tandis que McCartney a lui aussi poussé le son de sa basse au maximum.

Il y a aussi le chanteur d'ACDC, le guitariste des Eagles, le guitariste des Doors, le fiston de Keith Moon et tout un tas d'amateurs grandioses de gros rock qui tabasse, qui sue et qui se saigne sur des décibels impressionnantes. Juste avant sa mort, le géant Christopher Lee apporte sa contribution pour que le décor morbide et délirant soit planté.

C'est un peu la réunion de anciens du lycée. Mais ils prennent un malin plaisir à faire renaître les sensations de ce bon vieux rock de papys. Les jeunes connaissent cela par le jeu video Gutar Hero mais là, la démonstration est faite en vrai, par des vieux briscards, qui n'ont plus rien à prouver mais qui semblent beaucoup rigoler ensemble.

Republic - 2015

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