Vernon Subutex T.1
Je suis au soleil. Un hamac est installé dans le jardin. Les amis se reposent après chaque repas. On me dit que les deux tomes du dernier Despentes sont dans la maison écrasée par la chaleur. Je crois avoir trouvé ce qu’il faut pour me jeter dans le hamac.
Mais l’écriture de l’écrivain est bien plus assommante que les hautes chaleurs de l’été. En gros, elle convoite de faire une grande étude de la société française, évidemment déprimée et inquiète de son futur.
Avec Houellebecq, Virginie Despentes gratte les plaies de la France. Il y a les doutes et les faiblesses d’une société qui craint tout et plonge dans une mélancolie mortifère : les Français et le syndrôme du « c’était mieux avant », voilà ce que pourrait résumer ce premier livre et une bonne partie de la production nationale.
Finalement le deuxième tome, je ne l’ai pas lu. Elle a eu raison de mon courage ! Ce sont les vacances, bordel. Ayons un peu le cœur à sourire et les atermoiements de quinquas sans rêve, ce n’est pas franchement l’idéale lecture de saison. Moi j’ai besoin de me divertir et Despentes semble obséder par la description des maux bien franchouillards.
Pourtant le début du roman est plaisant avec ce personnage très rock’n’roll, ancien disquaire reconnu qui glisse petit à petit vers la marginalité. Mais le style devient rapidement répétitif. Le récit joue sur un systématisme qui devient redondant ou paresseux.
A chaque chapitre, gravitent d’autres personnages qui font avancer la petite histoire qui justifie une vision nihiliste de la société. Virginie Despentes rebondit de personnage en personnage mais ca ne suffit pas pour justifier une intrigue qui manque de corps.
Le récit devient une succession de clichés sur nos malaises, nos défauts et rien d’autres. C’est un peu pénible au point que j’attendrais l’année prochaine pour jeter un coup d’œil sur le second tome qui ne trainera pas cette sociologie noire, caricaturale et sans grande vivacité. Triste constat à tout point de vue !
Grasset – 400 pages
Star Trek Into Darkness
Encore des défauts dans ce Star Trek, mais cet objet de culte aux USA reste encore un spectacle exotique, naïf et spectaculaire pour nous.
James Kirk est encore ce fringant capitaine, un peu tête à claques et aussi expressif qu'une cannette de Budweiser. Le premier réflexe serait de lui coller une mandale avec son air suffisant qu'ont souvent les héros américains.
Kirk version JJ Abrams, c'est un couillon costaud qui marche au bon sens commun. Il a une différence (majeure) avec tous les héros qui sauvent le Monde: il travaille avec une bande. Et son équipage est plutôt sympathique.
Spock et ses raisonnements terriblement logiques. McCoy et son aversion pour l'improvisation. Uhura et son sex appeal qui cache une grande intelligence. Scotty et son accent libertaire. Sulu et son sens du devoir. Chekov et ses angoisses de navigateur. Ils sont tous là. Bien représentés. Avec les interprètes parfaits pour jouer ces nouvelles incarnations de l'univers Star Trek.
Le premier épisode autour de la jeunesse de Kirk remettait avec panache en selle la franchise. Cette fois ci, l'auteur de Lost et mille autres réussites pour geeks et fans en tout genre, met les gaz vers l'aventure la plus débridée.
Tout est sacrifié pour le rythme. Les morceaux de bravoure s'enchainent. Pas de répit. Peu de temps mort. Et peu de grand bavardage. Pour cela il y avait le premier volet. Ici, c'est action, baston et explosion.
Hollywood s'est trouvé un nouveau Jedi (Abrams va s'occuper du prochain Star Wars) car il faut le dire: il est un peu magicien ce spécialiste de la série télé. Il a un sens aigu du récit et de rebondissement. Star Trek Into Darkness ne semble pas tenir en place. Il y a dans la narration plein d'idées. Ca peut paraitre brouillon ou même vain pourtant le cinéaste et ses copains tentent vraiment de ne pas faire comme d'habitude.
Comme Spielberg, JJ Abrams veut que le rythme entraine le spectateur dans l'action mais aussi l'émotion. Il jongle avec une habileté folle entre les enjeux dramatiques et l'utilisation personnages. S'il élimine des sous intrigues (le trio amour Kirk-Spock-Uhura), il continue à rendre ses personnages attachants malgré qu'ils soient entièrement attachés à leur fonction dans un scénario assez conventionnel mais plutôt touchant.
Car Abrams et son pôle d'écriture connaissent les vertus de la franchise: ils collent à une actualité brulante. Au delà de tous les effets spéciaux, le film raconte très bien les douleurs américaines et traumatiques. Il y a beau avoir de l'action, le film écoute cette Amérique aussi belliqueuse que généreuse. Certaines images sont troublantes, surtout celles des attentats certes futuristes mais qui rappellent de tristes réalités. Subsiste dans un détail ou un plan: l'espoir. Le rêve. L'aventure.
On a vite oublié le coté casse cou et impulsif de Kirk. La méthode de Abrams est complètement affirmé dans cet épisode. Il y a certes des longueurs (la fin s'étire) et des erreurs (on reconnait encore trop l'american way of life dans Starfleet) mais le réalisateur montre qu'il a compris le plaisir de la science fiction, la nature pacifiste et heureuse de Star Trek, les folies du blockbuster contemporain. Malgré sa nouvelle jeunesse, cette saga reste toujours impressionnante par ces utopies, qui résistent encore au cynisme d'aujourd'hui. Est ce que ca va marcher sur un troisième numéro sans Abrams. On attend de voir. Peut être l'été prochain!
Slow Gum
Fraser A.Gorman a sûrement beaucoup écouté Bob Dylan. Mais qui ne le fait pas de nos jours? Cet Australien doit avoir sûrement des disques de Neil Young et quelques autres folkeux célestes. Gorman ne fait pas dans la nouveauté, et alors?
Le premier titre convoque Dylan et le second, Neil Young, avec une guitare couïnante et un violon voyageur. Le tout ne ressemble pas à un sage exercice de style. Ce jeune homme ne vit pas dans son époque. Le monde moderne doit l'emmerder sérieusement. Les nouvelles technologies, la vitesse, le village monde où les distances se réduisent... tout cela, cela semble l'ennuyer.
Son premier opus prend son temps. Une qualité oubliée chez les jeunes. Low ou Mid tempo. Le plaisir de jouer de la musique ensemble. Des paroles laconiques. Un ton désenchanté mais jamais désespéré. Il semble même un peu roublard le gaillard!
Il a comme Jack Johnson un petit coté agaçant, sûr de ses forces et son talent, mais il fait tout pour ne pas avoir l'air d'y toucher. "Je suis malin mais je vais le cacher au maximum". Comme Beck on voit un dadais endormi mais son rock inspiré par d'autres est facilement envoûtant.
Sans négligence, son album est une belle succession de titres rétros mais pas trop. On y entend le son des anciens mais le petit gars a le sens de la ritournelle et de la confidence. On se sent bien avec lui...en très peu de chansons.
De Melbourne, on a bien l'impression de se promener dans l'Amérique des petits, la fameuse Americana. Fraser A.Gorman n'est pas un nostalgique: il réveille avec finesse les vieux démons de la folk. On a tendance à réduire cette musique à quelques notes molles: cet Australien fait une très forte impression et secoue idéalement nos vieilles habitudes!
Imports - 2015
Star Trek
Après Mission Impossible, le créateur de Lost, futur réalisateur du Réveil de la Force, revisite un monument de la télévision américaine. Le coup de jeune réussit plutôt bien à la Fédération Starfleet !
En France, on se moque gentiment de la célèbre série Star Trek. Arrivé trop tard sur nos écrans, la série de Gene Roddenberry n’a jamais convaincu le public. Les films ont accentué l’incompréhension (c’est quoi ces vieillards de l’espace ?) et les séries dérivés restent exotiques. Avec leurs pyjamas et leur vocabulaire technique, les membres de l’USS Enterprise ne sont pas les bienvenus chez nous. On reste sur notre culte aveugle pour Star Wars.
Pourtant il y a des qualités dans cette saga galactique. L’utopie qu’elle présente est délicieuse et son reflet exagéré de la réalité américaine l’implante durablement dans la culture populaire.
Exemple parfait de ce que doit être dans le fond, la science fiction, Star Trek ne pouvait que revenir sous une forme ou une autre. Brillant producteur de la série Alias et Lost, réalisateur du dernier volet de Mission Impossible, JJ Abrams est un fan de la première heure et la personne idéale pour relancer la franchise. 7 ans après la dernière apparition de l'USS Enterprise sur grand écran!
Il part d’un principe simple : raconter la jeunesse des héros de la saga. Kirk est alors un petit sauvageon à l’esprit rebelle. Spock doit gérer sa nature humaine et vulcaine. MacCoy pratique le cynisme avec un talent certain. Uhura est déjà une affolante traductrice. Tout le reste de l’équipage se rencontre et se découvre.
Heureusement le premier vol de l’Enterprise ne sera pas une partie de plaisir. Un vilain Romulien a décidé de détruire les planètes de la fédération avec un vaisseau à faire des trous noirs…
La mythologie est respectée et profite allègrement des effets numériques et de l’entrain du cinéaste à réaliser un spectacle plein. Si le début laisse craindre le pire (course poursuite sur fond de Beastie Boys), la suite respecte et améliore les conventions.
Kirk est déjà une tête à claques mais ses prises de bec avec Spock (sur l’utilisation de la force, un sujet sensible en ce moment) ne sont jamais inintéressantes. La réflexion n’empêche pas un divertissement rythmé et plaisant.
Les novices pourront voir un bon film d’aventures avec une vraie écriture de personnages (Abrams aurait dû écrire le dernier Idiana Jones) et les initiés vont se régaler des clins d’œil et de l’humour souvent brillant d’un scénario qui ouvre des possibilités passionnantes pour de probables suites. Star Trek a toutes les chances de ne pas nous proposer des suites en forme de trous noirs !
Hands
Jazz et bluesy, c'est le son estival d'Etat Critique. Quand le jazz est là, la java s'en va! Ancien contrebassiste de Miles Davis, Dave Holland invite alors le flamenco pour rencontrer le jazz. Un disque estival et très hispanique!
Dave Holland est un bassiste que l'on pourrait juger classique. Anglais, il remplace Ron Carter pour accompagner Miles Davis. Il suit ensuite Chick Corea avant d'imposer sa propre patte. Installé à New York, Dave Holland devient au fil des décennies une figure majeure du jazz.
C'est aussi un type curieux et ouvert. Il embarque pour l'Espagne afin de rencontrer Pepe Habichuela. Célèbre guitariste de flamenco, ce dernier accepte de jouer avec le bassiste. Le résultat est un puissant euphorisant.
Un disque à mettre dans les bagages. Car c'est une vraie rencontre que propose les deux musiciens. Le flamenco propose de caressants accords tandis que la basse réchauffe efficacement les morceaux. Pas de coté démonstratif. Les réponses que se font les deux instruments, sont douces, attentives et passionnantes.
Le duo invite à la découverte. Hands rassemble un talentueux jazzman et un guitariste hors pair pour un voyage dans l'univers de la musique espagnole. Le jazz apporte une touche moderne mais Holland se laisse aller aux traditions ibériques. Ils ramènent ensemble toute la classe espagnole, cet art de vivre, cette fierté de faire claquer les cordes...
Le résultat est pourtant original. L'aspect hispanique se compose d'un jazz discret et d'une guitare inspiré. Le voyage est bien agréable. Ce disque fait voyager. On s'imagine très facilement sur une place andalouse, à l'ombre, près d'une terrasse, à profiter du farniente et de la quiétude.
On peut emmener ce disque sur toutes les terrasses du Monde. Il provoque la même sensation. Le bien être et le plaisir de la musique. On se sent très bien au bout de dix morceaux. Donc on recommence. Hands est un moyen économique de voyager pour pas cher.
Dare 2 - 2010
La Promesse de l’ange – Frédéric Lenoir – Violette Cabesos
Art roman et roman polar à l'honneur !
La Promesse de l'ange est un bon polar historique sur le Mont-Saint-Michel et ses constructeurs bénédictins du XIe siècle. Ecrit par Frédéric Lenoir et Violette Cabesos, le roman a une grande qualité : réussir à plonger le lecteur dans la vie de l'abbaye en 1023. Pour cela, les auteurs s'appuient habilement sur une intrigue menée tambour battant par une héroïne contemporaine nommée Johanna et de solides connaissances historiques sur le Mont.
Archéologue hantée depuis son plus jeune âge par un rêve traumatique de moine décapité lui répétant en latin pour accéder au ciel il faut fouiller la terre, Johanna se voit rattraper par son destin. La voilà responsable d'un chantier de fouilles au Mont-Saint-Michel. Il s'agit de découvrir les causes d'une modification architecturale de l'abbaye et l'auteur de ces changements. Le lecteur se voit alors à la fois plongé dans les recherches archéologiques de l'héroïne et dans les prémices architecturales de l'abbaye. Jalousies et croyances contemporaines viendront lui mettre des bâtons dans les roues.
Si l'écriture n'est pas aussi fleurie que celle d'un Jean-François Parot, les détails donnés sur l'abbaye, le discours d'évangélisation de l'époque, les joutes verbales et les descriptions de personnages haut en couleur font leur effet. L'époque médiévale est valorisée au travers de moines respectant la Règle de St Benoît et une foi qui les pousse à bâtir des montagnes. L'époque des croyances bat son plein. L'époque contemporaine laisse apparaître des personnages dont les intentions sont souvent égocentriques, liées à des carrières et des conflits d'intérêt. Le lecteur plonge moralement en faveur du XIe siècle, de ces moines, même si bien sûr quelques brebis galeuses viennent assombrir le tableau pour pimenter l'intrigue.
Le roman est lui d'architecture assez classique. L'intrigue du XI siècle croise celle du XXIe grâce à une alternance de chapitres qui se font écho. Parfois le XIe siècle devance l'enquête de Johanna, parfois l'enquête de Johanna répond aux mystères laissés par les abbés montois. On se laisse malgré tout rapidement emporté par le jeu de pistes de Johanna et les références aux croyances de l'époque chrétiennes ou celtiques. Inévitablement, le roman donne envie de retourner au Mont et de redécouvrir l'Archange. Dans une balance, nul doute que ce joli polar sur l'art roman est un bel hommage au site et ferait pencher le plateau du bon côté. Un petit paradis.
(La Promesse de l'ange a obtenu le prix des maisons de la presse en 2004 et a été traduit en 10 langues... cela s'appelle un succès de librairie ? Un best-seller ?)
Star Trek Némésis
Complètement has-been, la série Star Trek doit rapidement se reprendre. La Paramount fait alors le ménage pour donner un peu de vitalité à un équipage vieillissant. Le pari est presque réussi!
Au dixième épisode, il ne faut peut être pas s'étonner que Star Trek commence à battre de l'aile. Star Trek Insurrection est l'un des pires épisodes. Le réalisateur et comédien Jonathan Frakes est remercié et remis à sa place devant la caméra.
Rick Berman, producteur de la série télévisée, demande à Stuart Baird de réaliser ce nouveau volet. Monteur exceptionnel, il a travaillé sur le premier Superman et encore aujourd'hui il monte de gros films d'action comme les derniers James Bond. En tant que réalisateur, il a mis en scène un sympathique US Marshalls et l'efficace Ultime Décision. Proche de Richard Donner, il fut responsable de la seconde équipe de L'Arme Fatale.
Il fallait bien quelqu'un comme lui pour redonner un peu d'énergie à un USS Enterprise qui ressemble un peu à une maison de retraite pour comédiens à la ramasse. Lui aussi présent au générique des derniers James Bond, John Logan, auréolé du succès de Gladiator, rédige un script sur un choc des générations pour le commandant Picard.
Puisque ce dernier va se retrouver face à un adversaire redoutable: son clone en plus jeune! Il est aussi malin que lui. L'ADN du commandant c'est du costaud en matière de stratégie militaire et d'intelligence hors du commun. Picard est bien embêté (on pourrait même dire qu'il est refroidi... pardon, c'était facile).
Interprète de Data, l'androïde de l'Enterprise, Brent Spiner a imaginé l'histoire de Némésis donc s'offre aussi le beau rôle. Le robot va donc connaître lui aussi une aventure un peu similaire: cet épisode philosophe sur l'héritage et la conscience. Logan et Baird sont là pour que l'on ne tombe dans des dialogues sans queue ni tête! Ils mettent du rythme et cela se ressent.
Heureusement pour le spectateur: Star Trek retrouve sa nature de divertissement léger mais pas si bête! De plus, il oppose à Patrick Stewart, un jeune comédien qui a depuis grimpé au sommet du box office et du cinéma populaire: Tom Hardy. De plus le film s'intéresse aux Romuliens (et leurs jumaux, les Rémus), vieilles connaissances de l'univers Star Trek, toujours dépassées par les Klingons, plus charismatiques!
Mais le résultat est là, les membres de NextGe peuvent partir la tête haute, avec cette honnête série B. Avec l'échec d'une nouvelle série Star Trek Enterprise, la saga ne va pas forcément mieux mais les efforts sont louables et prouvent qu'il y a toujours de la vie dans cette galaxie dense, folle et joyeuse de Star Trek. De quoi faire travailler l'esprit brillant de JJ Abrams, tout jeune producteur de la série Alias... et grand manitou des geeks de tout poil!