Awake

Il y a encore des musiciens qui font de l’ambient? Pour s’imaginer mélomane sur la Lune !

Le nom de ce musicien provient de la Lune. Il s’agit du nom d’un cratère sur les montagnes lunaires découvert par un Danois. Tycho donne donc des indices sur son style : effectivement il pourrait être un descendant de Brian Eno période expérimental avec Apollo, bizarrerie sonore venue d’ailleurs dans les années 70.

Tycho doit aimer Eno, brillant producteur et inventeur de l’ambient, électro primaire mais assez pertinente. Scott Hansen s’envoie en l’air donc à coup de rythmes cools et d’instruments simples. Sa musique est planante.

Et on ne va vraiment s’en plaindre. Effectivement sa musique est un possible « ailleurs », un endroit harmonieux. Une belle utopie qui en trente minutes nous convient parfaitement bien. Mais on l’oubliera peut être un peu rapidement. En tout cas, il a le grand mérite de rappeler les vertus du genre. Le synthétiseur, la boite à rythme ou le séquenceur ne sont pas des objets froids. Il évite l’écueil de la conceptualisation forcenée.

Awake propose une musique de déambulation, de promenade. C’est une invitation pour avoir la tête dans les étoiles ou dans un aquarium plein de bulles sonores. Ce n’est pas du tout désagréable mais en 2014, on ne s’attendait plus à autant de tranquillité ouatée.

Ghostly International - 2014

Phoenix

Ce nouveau drame psychologique de Christian Petzold est à la hauteur de Barbara, d’une grande subtilité et magnifiquement interprété, dans un registre plus sombre et impitoyable.

Pour un énième drame sur les suites de la Shoah et la fin de la Seconde guerre mondiale, celui-ci se distingue par sa sobriété, le resserrement de son intrigue, qui pourrait être celle d’une pièce de théâtre et repose presque uniquement sur trois personnages complexes, et sa forte intensité psychologique. Comme dans son précédent film Barbara, dans lequel Nina Hoss et Ronald Zehrfeld tenaient aussi les rôles principaux, Christian Petzold explore les traumatismes de l’après-guerre en Allemagne à travers un très beau portrait de femme passionnée et tourmentée. Nelly Lenz, qui a miraculeusement survécu aux camps, est recueillie à Berlin par son amie Lene.

Après avoir fait reconstruire son visage par la chirurgie, elle tente de retrouver son mari Johnny pour reconstruire sa vie. Mais Johnny ne la reconnaît pas – ou refuse de la reconnaître – et lui propose de se faire passer pour son épouse afin de récupérer et de partager son héritage. D’où un jeu de rôle malsain entre les deux époux et une ambiance angoissante proche de celle d’un thriller, avec des scènes dans les ruines mal famées de la ville, de nuit, un temps souvent morne et pluvieux, et la claustrophobie que l’on ressent dans la cave qui sert de logis à Johnny.

La principale qualité du film tient à l’interprétation ultrasensible de Nina Hoss, qui incarne à la fois le traumatisme des camps de concentration et une lutte intérieure entre amour, espoir et dégoût pour l’homme qui la torture. Elle ressemble à un petit oiseau malade, recroquevillé sur lui-même, voûté, les yeux immenses cernés par ses ecchymoses, et dans son regard intense se lisent à la fois son espoir fou, ses doutes, sa souffrance contenue, son extrême fragilité comme son étonnante force morale de survivante. Les scènes, statiques pour la plupart, sont souvent tournées en plans rapprochés, avec un beau travail de la lumière, sur les protagonistes face à face ou côte à côte qui s’observent, se jaugent ou s’efforcent de sonder leurs pensées respectives.

On peut aussi admirer dans ce film la très fidèle reconstitution des ruines de Berlin en 1945, de sa vie nocturne et de sa société profondément divisée entre anciens nazis, tout-venant, « traîtres » et rescapés des camps. Les haines sont encore vives et les relations humaines, sans pitié. Christian Petzold excelle à rendre compte de cette période sombre et chaotique, quand le peuple, encore sous le choc de la guerre, s’efforçait de renaître de ses cendres, tel un phœnix.

Peut-être reste-t-on finalement un peu sur sa faim, après toute la tension accumulée, mais le dénouement, très subtil, se justifie tout à fait. Le drame est maîtrisé jusqu’à la dernière scène.

Avec Nina Hoss, Ronald Zehrfeld et Nina Kunzendorf -  Diaphana Distribution - 28 janvier 2015 - 1h38

 

Hotel de Lausanne

Vous aimez Modiano ? Alors courrez acheter cet hôtel-là : le roman de Thierry Dancourt a reçu un prix mérité du Premier Roman, mais il aurait pu remporter aussi bien un Grand prix du pastiche… Deux plaisirs en un.

L’inaction se déroule dans un passé vague et des lieux précis, les personnages sont mystérieux, évanescents, habitent les rues du XVIe arrondissement de Paris… Quand je vous le disais que c’est du Modiano ! Et du bon…

L’histoire débute au chapitre II, dans les allées du cimetière de Passy. Le narrateur, Daniel Debaecker, fait la connaissance de Christine Stretter et du fascinant immeuble de style paquebot qui domine la palais du Trocadéro, de l’autre côté de l’avenue Paul-Doumer. Elle a vécu là, il y a longtemps... Il fait gris. Enfin il pleut. Repli vers l’avenue Bugeaud, non loin, dans un café désert.

Le lecteur navigue ensuite avec ce couple improbable, elle est fiancée après tout, entre des limites étroites fixées par la rue Berton, au sud, et l’avenue Foch, au nord. Et au milieu coule la rue Chalgrin. Dans la rue, l’hôtel éponyme abrite les journées de Christine et Daniel, ainsi qu’une mystérieuse collection de vieilles photographies accrochées aux murs. D’autres hôtels, ailleurs…

A la page 116, le roman prend un coup de soleil : Daniel est à Casablanca, sur la piste d’une paire de fauteuils Royère, pour le compte d’un de ses clients. Mais le vrai but du voyage est ailleurs que chez le particulier qui vend son salon.

Est-ce un hasard si le nom du narrateur est l’anagramme presque parfaite de Baedeker ? Le roman nous conduit sur les itinéraires d’un tourisme architectural précis, qui participe du charme de sa lecture, pour peu qu’on soit sensible à la matière. Et le couple illégitime formé par Daniel et Christine invente même une forme de voyage immobile à travers ces beaux livres régionalistes dont le titre hausse du col telle ou telle ville de province.

Même le choix des mots semble parfois modianesque :"Jean Delorme, imprésario." (page 90) "Imprésario", et non "agent", qui aurait fait basculer la phrase dans la modernité. Les personnages principaux non plus ne semblent pas vouloir basculer dans la modernité, dans le présent. Des déclassés ? Plutôt des déphasés, qui préfèrent parcourir des mappemondes, descendre dans des hôtels en noir et blanc. Le temps d’une lecture, le lecteur suit leur pente avec délectation.

10/18

SLAM sur France 3 ou le jeu idéal d’un panda

slam

Non, non et non, je vous vois d’ici me huer, me conspuer, préparer des cageots de tomates à me balancer à la tronche, mais non, je ne ferai pas de chronique sur LA Nouvelle Star !!! Oui, bien sûr, il y a forcément de la matière à chronique mais de un, déjà je l’ai pas vu, et de deux, et bah j’ai pas envie, alors je vous demande de vous arrêter (Phrase Balladurienne).

Mais oui, oui de oui, j’avais envie de tremper mon acide plume numérique pour vous livrer mon avis, humble comme toujours, sur le très palpitant jeu SLAM, sur France 3.

Résumons, si vous le voulez bien, ce jeu TV de fin d’après-midi, sur la chaîne des Régions où Maitre Capello et Jean-Pierre Descombes n’en finissent plus de hanter les couloirs. SLAM est une sorte de mots fléchés géants, tchip, où sur un écran bleu, tchip, des cases jaunes, tchip, font apparaître des lettres, bon bah des lettres quoi, ça peut pas être tchip des lettres, si ? bon bah des lettres tchip alors.

Déjà, vu comme ça, le rêve pointe, le désir monte, l’envie de se mettre 25 minutes devant SLAM vous vient comme une envie de trippes à la mode Caen après l’amour, tellement évident.

Mais n’est-il pas, finalement le jeu idéal pour un « glandouille day », un « rien n’à branler day », un « le monde peut s’écrouler, je ne bougerai pas de chez moi day». Un matin qui commence par le fait prendre un café et d’aller acheter l’Equipe, seules initiatives cohérentes du jour, puis se vautrer le corps (musclé et athlétique, je précise) dans son canapé, et y rester en mode Panda, manger l’intégralité du bambou du salon, se gratter les testiboules avec un crayon à papier...bonheur.

Après je vous conseille un bon documentaire bien bien chiant et bien bien long, prenez idéalement un truc sur les jardins japonais de tel ou tel château de la Somme, et bang ! Normalement première sieste. C’est important de dormir pour un panda.

Vous vous réveillez 1h plus tard, trace de bave sur le coussin du canapé, et Planéte+ a enchainé avec un documentaire sur la 2nde guerre mondiale, mais la guerre c’est mal, vous n’aimez pas, moi non plus, zappons.

Un petit coup de chaine Info, tranquille, le Panda s’informe mais a vite peur de par les breaking news sur l’Ukraine...pays tellement lointain pour un panda occidental.

Vous allez pisser, oui, important, vous vous levez pour aller pisser, vous êtes en mode Panda soit, mais pas goret non plus, n’exagérons rien, votre canapé a beau être votre unique propriété, il convient de le laisser propre, a minima.

Re-sieste, idéalement devant une série allemande sur TV Breizh, faut sortir les grands moyens, vous avez déjà dormi 1h le matin, faut mettre du lourd sinon vous êtes capable de rester éveillé !

Et là, 16h10, France 3, roulement de tambour, fanfare télévisuelle, préparation ultime, panda jouissance, moment high level de glande, c’est de la folie dans votre canapé comme dans toutes les maisons de retraites de France, c’est le début de l’après-midi jeu sur France 3….rrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr !!!! Moment de bonheur et de non-excitation suprême.

Avant l’érection viagraïsée de « Question pour un champion », il y a…SLAM.

Un décor en fonds bleu-orangé lubrique vous embraque dans un monde de lettres et de mots, car oui, des lettres, bah ça forme des mots.

3 candidats nés aussi pandas (ils vont les recruter dans les viviers de pandas français) sont prêts à en découdre. Les chemises sont patchworkées, les robes tendances 80’s, les tronches sous tranxen, les voix d’un dynamisme proche de l’annonce de Gicquel et de sa « France a peur ».

Animé de nain de maître (oui, oui, j’ai bien dit nain) par Cyrille Féraud, animateur gaulé tel une allumette finement coupée pour en faire un cure-dent, le jeu se lance dans le délire le plus total. A côté, Motus, c’est le Macumba Night de Roubaix avec 8 salles et 9 ambiances.

Et là, enchainement, virevoltage télévisuel : « Martine, il est au début de sel et débute le soleil » ? Là, normalement, vous êtes paumés 10 bonnes minutes et vous comprenez après coup que pour trouver des lettres sur la grille, il faut répondre à des énigmes niveau Père Fourasse X 1000, ici, Martine devait donc trouver la lettre S. « René : Il est autant dans le bœuf que dans l’œuf, on ne le vole pas et il est placé en deuxième ??? »…Oh put*** !!! Mais c’est le O bien sûr !!!

Les grilles jaunes toutes pas belles se remplissent et quand y’en a un des trois qui croit avoir trouvé le mot (toujours formé par des lettres) et bah le gars il buzze ! Il pensait être peinard, mais non ! Le nain Féraud lui rebalance une énigme. Le mot N°4 était P.SSI.N, manquaient plus que le A et le O pour faire PASSION, et bang, le Féraud il te pète un « Ne nage pas toujours dans l’eau quoi que peut être exotique tout en étant synonyme de plaisir !!! »….rhhhaaaaaaa, et l’autre forcément, déstabilisé, il te pète un POISSON alors qu’il avait trouvé PASSION !!! Olalalalalalalala, mais quel bordel !

Bon, après la traditionnelle course à l’australienne, chaque candidat est éliminé, il n’en reste plus qu’un (et ici pas question de faire voter le public, ils sont tous morts au bout de 5 minutes, et encore moins balancer des SMS façon interactive, les téléspectateurs sont des pandas comme moi –donc pas facile avec Panda Telecom de balancer des SMS- ou des vieux de maison de retraite et chacun sait que ça passe pas la 3G en maison de retraite).
Phasssseeeeeeee fiiinnnalllllleeeeeeeee ! Oui, c’est parti pour la phase finale. Le rescapé reste avec le petit Cyrille (qui doit se dépêcher car il est déjà 17h45 et ses parents vont commencer à s’inquiéter) et se retourne, dos à la grille, fesses serrées, une grille ça peut attaquer à tout moment.

Et là, il doit en 2 minutes, trouver 10 mots ! tout ça pour gagner une boîte de jeu et un massage thalasso de 30 minutes à Vesoul…et le mec, bah il est à fond quand même ! Et mon Cyrille, il trépigne, il trépigne, il est tout fou tout fou !!!

Bon, voilà, le candidat se vautre lamentablement sur 7 des 10 énigmes, il perd mais repart avec sa boîte de jeu, pour la rime et comme on dit chez les pandas, « à boîte de jeu, panda ravi, panda joyeux » !

Trois soeurs, Anton Tchekhoc, Christian Benedetti

(c) Roxane kaspersky
(c) Roxane kaspersky

Ni drame, ni comédie, mais une danse rythmée où les 2 genres s'entrelacent: c'est ce que proposent Christian Benedetti et sa troupe avec cette nouvelle interprétation des "Trois sœurs" de Tchekhov, en ce moment à l'Athénée Théâtre, et bientôt en tournée.

"A Moscou! A Moscou! A Moscou! (...) Si on savait! Si on savait! Si on savait!"... Entre ces deux souhaits, celui d'Irina à la fin de l'Acte II, et celui d’Olga à la fin du dernier acte, cinq ans passent. Cinq ans d'une vie de province, où les jeunes gens commencent à travailler, où les femmes trompent leur mari, où "les maris mentent et font semblant de ne rien voir", où les parvenus s'embourgeoisent et où les aristocrates perdent progressivement leurs privilèges et possessions.

Comme ailleurs dans le théâtre de Tchekhov, il est question d'une époque de transition (où le père vient de mourir, où l'Ancien Régime vacille...) : une situation risquée qui donne à voir des personnages dans leur fragilité. Et peut-être plus qu'ailleurs, on y philosophe sur le sens de l'Histoire, et par extension, sur le sens de l'existence: sens questionné, ardemment désiré, radicalement nié et finalement caché ou en tout cas muet.

Ceux qui connaissent bien cette pièce, souvent montée, seront surpris de l'entendre comme pour la première fois: Benedetti prend le parti d'un tempo rapide, les acteurs déclamant allegro, évitant pathos et pesanteur. Même les dernières répliques du Docteur et d'Andreï, pourtant déprimantes sorties de leur contexte, ne peuvent entraîner l'ensemble vers le sombre.

Les êtres se reconnaissent, se déclarent leur flamme, se demandent en mariage, se quittent et meurent dans une étrange et lumineuse valse à mille temps. Et s'intégrant à ce tempo, de longues pauses, de longs silences ridicules (quand une blague fait un bide) ou vertigineux (quand tout le monde regarde tourner une toupie, jusqu'à l'épuisement de son mouvement) s'intercalent, fidèles aux didascalies. Au final, l'ensemble est enlevé et ne dure qu'1 heure 50.

Le plus important étant que, grâce à ces contraintes formelles (et aussi artificielles qu'elles puissent paraître, du moins au départ) les acteurs font des merveilles. Ces personnages mille fois entendus sont éclairés d'une lumière nouvelle: le mari de Macha est carrément méchant, l'amoureux d'Irina (le baron Touzenbach), d'une innocence virginale, la crise de nerfs d'Irina et les aveux de Macha à l'Acte III, totalement bouleversants...

Bref, c'est une merveille d'intelligence qui réveille et actualise ce "classique" du théâtre moderne.

A (re-)découvrir à l'Athénée Théâtre-Louis Jouvet jusqu'au 14 février: le mardi à 19h, du mercredi au samedi à 20h, et le dimanche à 16h.

Le parlement des invisibles, Anne Collod, Arsenal, Metz

Le Parlement des invisibles_cop_Laurent Philippe (4)

Une pièce chorégraphique qui questionne l’influence des morts sur les corps vivants et qui réactive la puissance de la gestualité expressionniste.

Dès le début, la nouvelle pièce d’Anne Collod nous plonge dans une ambiance sombre et captivante dans laquelle vaguent des corps-squelettes. Des silhouettes abstraites, des mouvements précis et stylisés : tout évoque clairement une ambiance expressionniste, dont l’intensité est redoublée par des projections sur les rideaux noirs du fond et sur des écrans-miroirs portés par les danseurs.

Cette référence historique assumée par une abstraction géométrique extrême est le fil conducteur de la pièce, dans laquelle les corps des danseurs figurent la vie et la mort, leurs possibilités représentatives, leurs dialogues discontinus et imparfaits.

Le parlement des invisibles travaille le concept de vitalisme (la séquence carnavalesque en est l’apogée), sa survivance à un siècle de distance ; elle questionne le sens que ce courant philosophique peut acquérir aujourd’hui.

En travaillant différentes couches et qualités d’images, le flou des corps dans l’obscurité, l’ambiance de mystère associée à la puissance des compositions de Camille Sain-Saëns reprises par Pierre-Yves Macé, Anne Collod pousse le spectateur à un effort constant de compréhension des actions jouées sur scène et le surprend par moment avec des images puissantes et énigmatiques.

La force conceptuelle de l’expressionnisme est ici réactivée comme image pure.

 

 

 

Polly & the Fine Feathers

Folk dépouillé. Petit disque amer et délicieux en même temps. Polly et ses copains sucrent parfaitement de vieilles traditions qui pétillent à nouveau!

Promenons nous dans les bois... la musique est connue et effectivement dans les bois, en ce moment on rencontre un paquet de jeunes Français qui cherchent l'inspiration pour défendre la country et le blues de leurs papas et même de leurs grands parents. Ils sont hype mais ils aiment les vieilles choses vintage, les guitares en bois, les harmonies vocales et les grands espaces mythiques.

Pollyanna, alias Isabelle Casier, a traversé le Tennessee en chantant. Elle s'est laissée bercer par les légendes américaines et revient en France avec deux nouveaux copains et des nouvelles chansons. Des titres simples, sans grand chambardement instrumental. Une petite musique très yankee.

Difficile de se plaindre. Pollys assure les cordes et le chant tandis qu'un batteur et un contrebassiste protègent les angles d'une musique véritable, mélancolique et assez attendrissante. Le disque nous met dans une humeur douce heureuse.

Pourtant les paroles sont respectueuses du genre: ce n'est pas très drôle avec des rêves douloureux ou des digressions qui laissent deviner des bleus à l'âme. Au fond des bois, le groupe parvient à trouver un équilibre, discret, délicat et souvent communicatif. Promenons dans les bois.... Avec Polly et ses amis, c'est vraiment une chouette balade...

Microcultures - 2015

Snow Therapy

Justement présenté dans la section « Un certain regard » au Festival de Cannes 2014, ce drame de saison original et magistralement filmé s’interroge sur les réactions instinctives face au danger et présente une analyse psychologique très fine de la perception de l’autre dans le couple.

Snow Therapy nous propose une curieuse expérience de psychologie sociale : soit un couple de Suédois et ses deux enfants venus se réunir en famille dans une station de ski des Alpes françaises ; alors qu’ils sont attablés dans un restaurant d’altitude, une avalanche se dirige vers eux ; le père de famille, pris de panique, s’enfuit en abandonnant femme et enfants, puis revient comme si de rien n’était, une fois l’avalanche maîtrisée. Comment sa femme va-t-elle réagir ? Comment la famille va-t-elle surmonter cette épreuve ?

On pourrait s’attendre, d’après la bande-annonce, à une comédie nordique à l’humour glacial. Or il s’agit plutôt d’un drame en cinq actes pour cinq jours de ski, au rythme lent, qui pose des questions sérieuses et met plus mal à l’aise qu’il ne fait rire, ou alors nerveusement.

Les questions qu’il soulève sont universelles (d’ailleurs, l’anecdote dont le réalisateur s’est inspiré était différente du prétexte qu’il a finalement imaginé – il s’agissait d’une fusillade en Amérique latine) : comment réagit-on face à un danger vital ? Est-ce l’instinct de survie individuelle qui prime ou bien l’instinct de protection de ses proches ? Qui peut réagir en héros et faut-il se sentir coupable si l’on n’en est pas un ?

L’épouse suédoise, très choquée, s’efforce sincèrement de comprendre ce qui s’est passé et de sauver son couple. D’où de nombreuses discussions avec son mari ou avec des tiers pour tenter d’analyser la situation – une thérapie par la parole – et peu de scènes d’hystérie comme une véritable comédie aurait pu en montrer.

La neige qui a fait émerger les problèmes d’un couple dont les liens s’étaient relâchés est aussi l’instrument apaisant de leur thérapie. Comme la station de ski et, plus largement, tout le massif montagneux et ses inquiétants canons à neige, théâtre du drame filmé en plan large, accompagné des vibrants violons de L’Eté de Vivaldi (mouvement du « presto » de L’Eté, dans Les Quatre Saisons), en introduction à chaque nouvelle journée, c’est un personnage à part entière. Immaculée, enveloppante, elle efface les aspérités et offre le silence feutré de ses grands espaces aux cris de désespoir des hommes.

En plus de poser de manière pertinente des questions fondamentales, Snow Therapy présente plusieurs séquences filmées de manière très originale, qui cassent le rythme – que certains trouveront trop lent – et suscitent un regain d’intérêt ou bien ouvrent une porte sur l’irrationnel : caméra au poing, par exemple, pour une scène de ski dans le brouillard, caméra fixée sur un drone ludique qui percute l’un des convives d’un dîner, ou encore, vues de loin dans la nuit, les lumières mystérieuses de ce même drone qui explore la station, piloté depuis les hauteurs de l’hôtel. Ces séquences sont aussi des incursions plus profondes dans le ressenti des protagonistes, qui oscillent entre apaisement cosmique avant la tempête et chaos intérieur.

Le père de famille n’est pas épargné par cette thérapie qui ne lui fait grâce d’aucune faiblesse – lâcheté, mensonge, orgueil… Mais il est finalement, comme nous peut-être, invité à se racheter et à donner le meilleur de lui-même.

Avec Johannes Bah Kuhnke, Lisa Loven Kongsli, Clara et Vincent Wettergren - Bac Films / DistriB Films - 28 janvier 2014 -  1h58

Arlington Park

Un livre admirable sur les reculades de la condition féminine, dans une ville de province. Voilà ce que nous montre Rachel Cusk. Voilà un livre où le mot espoir n’a pas sa place.

En 2007, Rachel Cusk est une romancière anglaise de 40 ans dont le roman, Arlington Park, vient de sortir pour la rentrée littéraire. Ce roman, grace au bouche-à-oreille est dans les dix meilleures ventes de livres. On est un brin étonné qu’un roman à la structure à la fois linéaire et répétitive, connaisse un tel succès. Etonné et dubitatif, sans que cela remette en cause le réel talent de l’auteure.

Cela révèle que les lecteurs français sont sans doute friands de romans où le pessimisme se déploie avec intensité.

Nous attendrons l'année suivante et la publication de son roman suivant pour comprendre si Miss Cusk a réellement du talent ou bien si elle est surcôtée parce qu’elle dresse un tableau terrible des frustrations féminines dans un quartier résidentiel d’une ville de banlieue anglaise. Tableau dans lequel beaucoup de nos concitoyens et concitoyennes se retrouvent.

L’action du roman se situe durant une journée d’automne ou d’hiver, durant laquelle il pleut beaucoup. Le roman est composé de tableaux durant lesquels quelques femmes sont dépeintes dans leurs actions de la journée, dans leurs pensées mais aussi dans leur essence, une essence qui va de la frustration au desespoir.

A la fin du roman, quelques-unes des femmes que Rachel Cusk a dépeintes, se retrouvent pour un diner d’une affligeante médiocrité, qui est comme un miroir d’un diner dépeint dans les cinquantes premières pages. Les diners décrits par Rachel Cusk sont des moments où les maris de ces dames, apparaisent sous un jour gris. Soit ils tiennent des propos racistes, soit sexistes. Et puis le roman se termine.

Par paresse intellectuelle, les médias français ont apparenté Arlington Park à Desperate housewives. Cela n’a rien à voir. Arlington Park se situe du côté de la tragédie humaine, d’une description anthropologique de l’humaine condition.

En fait, il pourait s’agir d’un livre admirable. Le bémol qu’on oppose à une telle réussite, est le suivant : à la lecture, passé le premier intérêt de la découverte, le livre vous tombe des mains parce que les personnages ressassent leurs frustrations. Il est difficile d’être passionné par des personnages qui s’enlisent dans les sables mouvants.

On aurait envie de demander naïvement à l’auteure, s’il n’y a pas un coin de ciel bleu dans ce qu’elle décrit. Eh bien non, tout est gris. Vous qui lisez ce livre, perdez tout espoir.

Points - 263 pages

The Age of Reason

On est une bande de djeun’s à Etat Critique. La preuve : on écoute le dernier Gramatik. Il est chanmé ! Et nous on se sent un peu ridicule !

Pour tout vous avouer, il y a peu, je ne connaissais pas du tout Gramatik. Ma curiosité s’est éveillé dans le métro devant une affiche. Gramatik à l’Olympia. L’affiche est très jolie, avec un style retro qui me rappelle les joyeux délires utopistes de Druillet ou Moebius. Tout ca m’intrigue.

A l’Olympia, ce sont des stars qui montent sur la scène mythique. Alors qui est ce type qui va squatter une soirée cette salle alors qu’il n’est pas aussi célèbre que Frédéric François ou Dave ? Est-ce le projet psychédélique de Laurent Gerra ? C’est vraiment bizarre.

La réponse est en fait assez simple : Gramatik est un dj slovène. Déjà je commence à comprendre mon inculture. L’exotisme est total. Je suis assez mauvais en culture urbaine des Balkans. Mais bon, après un passage sur internet, je comprends que le gars assure devant les platines. Les beats, il en débite !

Il a avec cet album atteint l’âge de raison le super dj slovène. Est-ce que ca veut dire qu’il va nous faire de l’électro pour publicitaires en manque d’inspiration ? Un petit peu : on pense à C2C dans l’alliage entre vieux chants soul et gros beats dévastateurs.

J’entends certains qui vont citer Moby mais franchement c’est un peu vache : ce disque remplit sa mission. Vous finirez par danser ou secouer la tête. Le gaillard a visiblement le sample dans le sang. L’adjectif « efficace » a sa place dans cette chronique. Ce n’est pas la révolution folle mais à la fin de plusieurs écoutes, on aurait presque aimé avoir une place à l’Olympia. Il faut toujours être curieux: ce n’est pas un défaut.

Lowtemp - 2014

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