Amère Russie
Un conflit pousse l'autre et l'on zappe de l'Ukraine à l'Irak, du Mali à l'autre bout du monde comme pour un film ou une chanson...
C'est l'époque qui veut ça ma brave dame! Et voilà que 2 jeunes auteurs nous replongent 20 ans en arrière dans le conflit Tchétchène. Ducoudray et Anlor nous ramènent en plein conflit qui a coûté la vie à de nombreuses personnes et notamment à la journaliste Anna Polikovskaia. Faut-il évoquer la langue de bois et la main de fer de Poutine? Il suffit de regarder l'Ukraine d'aujourd'hui pour comprendre si vous n'aviez pas l'âge!
Alors bien sûr des histoires de geurre on en connait. Mais ici, l'originalité réside dans la démonstration qui passe, sans pathos, par la mère de Volodia, jeune recrue qui a disparu en Tchétchénie. L'album débute par l'insouciance d'un adolescent s'amusant avec son chien et ses copains et puis dès la troisième planche, on comprend que le conflit a enlevé le jeune homme à sa mère qui le recherche désespèrement.
Le héros de la guerre c'est bien cette vieille dame qui parcourt des centaines de kilomètres persuadée que son fils n'est pas mort. Elle est belle avec toute sa naïveté faisant confiance au premier venu qui ne manquera pas de la berner. Elle est merveilleuse face aux brutes de tous les camps qu'elle n'a pas peur d'affronter espérant leur soutirer quelques renseignements qui pourraient la rapprocher de son fils.
La collection Grand Angle des éditions Bamboo a pris l'habitude de commettre des albums de qualité, lançant de jeunes talents prometteurs qui souvent atteignent un certain degré d'excellence dès les premiers albums. On se souveint ainsi de l'excellent "Envolée sauvage" de Galandon et Monin qui abordaient la déportation ou "Bourbon Street" de Charlot et Chabert qui parlaient de jazz sur fon de ségrégation raciale ou le contraire, pour ne siter que cela.
Aurélien Ducoudray nous offre un scénario vivant et enlevé ou la petite histoire donne une bonne perspective sur la grande Histoire. Le dessin de Anlor est parfait semi réaliste, nerveux se mariant parfaitement avec ses couleurs ce qui n'est pas si fréquent de nos jours. Cette jeune dessinatrice avait déjà fait montre d'un talent certain dans une autre série parue dans la même collection "Les innocents coupables". On notera enfin la qualité du dossier figurant en fin d'album et qui complète admirablement bien l'album
C'est donc avec impatience que l'on attend la suite d'"Amère Russie" après ce premier tome "Les amazones de Bassaïev" qui promet le meilleur pour la suite. Les auteurs ont d'ailleurs de beaux jours devant eux. Ils pourront traiter par la suite la Géorgie avec le conflit en Ossétie du sud, s'en suivra peut-être quelques albums su l'Ukraine et d'ici là il y en aura peut-être d'autres...
46 pages - Bamboo Grand Angle
Stuck in a cruel world
Nantais, François Michel est visiblement hanté par les voyages. La ville est une porte sur l'Océan et tout ce qu'il y a de l'autre coté de l'Atlantique. François Michel a visiblement fixé le cap sur la Jamaïque et les îles chaudes et dangereuses. Parce que le soleil tape fort sur les sonorités. Le reggae est facilement cramé par des effets un peu trop faciles et un rythme trop répétitif.
Alors François Michel a eu deux bonnes idées. Il a mélangé tout cela avec du rock'n'roll à l'ancienne. Et il a effectivement mixé tout cela avec de vieilles sonorités. Le résultat n'a pas de frontière. On pense au rock primitif comme au ska des premiers temps. La combinaison des deux fait franchement merveille. Un style unique. Un son vraiment atypique, d'une originalité chaleureuse!
Le son chaloupé des îles (on pense aussi à la musique hawaïenne) se marie très bien avec des accords simples et clairs d'un rock'n'roll faussement innocent. Le son vintage fait la différence sans trop faire dans le réactionnaire, le coup du c'était mieux avant. François Michel est plutôt un affranchi. Il se moque des modes et se fait plaisir sans oublier les auditeurs, avides de voyager avec ses petits airs exotiques et d'une fraîcheur stupéfiante.
Coincé dans un monde cruel, ce disque desserre l'étau autour de nous. Il nous convie à la découverte d'un monde sans fioriture, sans arrière pensée. Dans le vieux pot, il parvient à sortir une nouvelle recette qui fait du bien aux oreilles et à la tête. Un petit concentré de plaisir immédiat et d'enthousiasme simple. Un disque à posséder de toute urgence. Contre ce monde cruel qui voudrait nous enchaîner à la morosité ou au cynisme!
La baleine - 2012
Les Morts Perdent Toujours Leurs Chaussures
Pour certains, "un bon journaliste est un journaliste mort". Pour Juan Bermudez, un bon journaliste est un journaliste qui va au bout des choses.
Et c'est ce qu'il va faire lorsque son collègue Sebastian Murillo va être assassiné (même si la police soutient le contraire) pour avoir voulu enquêter sur une étrange course poursuite entre la police et des brigands qui s'est terminée dans un bain de sang.
"Une fusillade de première, vieux ! Aucun rescapé ! ça c'est terminé avec la bagnole sur le toit dans le canal. Comme au cinéma !". Bermudez va remuer ciel et terre (plutôt la boue de la corruption ordinaire) et, aidé de drôles d'amis d'un passé pas si révolu que ça, aller au bout de son enquête.
Le début de ce roman frappe par ses phrases courtes et sèches, une économie de mot qui donne tout son rythme au livre. Dans la deuxième partie, l'auteur change de ton, les souvenirs de Bermudez remontent à la surface et font perdre la concision du début (mais cela colle parfaitement avec les orientations que l'auteur a voulu donner à l'histoire). La fin, particulièrement noire, est musclée et ciselée, comme sait le faire Raul Argemi (pour ceux qui auraient manqué son premier livre traduit chez Rivages, il est temps de se rattraper), et récupère l'ensemble de cet auteur à suivre assurément.
330 pages - Rivages/Noir
Bastien et la magie des Pourkoipas
Un conte, une rencontre et un spectacle de magie interactif. (suite…)
The Mentalist
Mais c’est qui bordel ce John Le rouge !!!
J’avoue, si je suis assez fanatique de série US depuis de très très nombreuses années, de Six Feet Under en passant par The Shield, et autres Mad Men ou House of Cards ou même françaises quand elles piquent et claquent (Mafiosa, Engrenages…) et j’en passe… j’ai toujours eu un peu de mal avec la ligne éditoriale de TF1 ou de France 2 sur la thématique, non pas par snobisme mais par goût, c’est comme ça, m’emmerdez pas j’suis pas d’humeur.
Évidemment, je ne parle pas ici des bas fonds atteints avec des trucs de haute volée telle que Soeurthérèse.com ou Julie Lescaut, mais bien des séries où, en règle générale, les scènes se déroulent de façon obligatoire dans un hôpital ou font appel à des flics qui, à la différence de nos joyeux Braquo, sont assez propres sur eux, assez peu heurtés par la vie, portent la cravate 90’s comme personne et disposent de moyen qui rendraient jaloux James Bond.
Le scénario se répète tous les 3 épisodes, grosso modo, un méchant (mais qui en fait au départ quand il a témoigné était gentil que non non non tu peux pas te douter que c’est lui tellement qu’il a l’air gentil avec une vie normale, au choix chauffeur-livreur ou employé d’un magasin de Hi-Fi) a tué une pauvre strip-teaseuse dans un troquet de Las Vegas tenu par un gars d’origine latinos mais qui en fait est de mèche avec les russes car les russes ils sont quand même toujours super méchants pas beaux. Seul indice, un cure-dent dans le désert avec rien autour à moins de 100km, grâce à un drone dernière génération, mais qui, une fois envoyé au labo, permet de trouver en moins de 2 minutes l’ADN du gars, avec sa photo qui s’affiche et un gros MATCH (bip bip bip, oui quand ça matche, ça bip et en rouge en plus). Et bam, en effet, c’était bien le gentil qu’est en fait bien méchant, chemise à carreaux et casquettes de pompistes, avec la complicité de son frère handicapé de la tête…et non le méchant latinos dont on découvre qu’il protégeait la fille contre les méchants russes…bref, après t’appelle ça Experts, t’appelle Police Spéciale, t’appelle ça FBIPortédisparu, t’appelle ça Enquête Criminelle Manhattan, Los Angeles, Vesoul ou Kentucky Chicken Dips Mega Royal…tu mixes le tout, tu vends ça à TF1 et tu fais 6 millions de téléspectateurs dans les mauvais jours.
Heureusement, de temps à autres, une série « hertzienne » arrive un peu à sortir du rang, de par un personnage et/ou un concept un peu original. Nous pouvons affirmer, en tous cas moi je l’affirme, c’est ma chronique je fais comme bon me semble et là il me semble bon de le faire, que The Mentalist appartient à cette rare catégorie. Il y aussi « fais pas ci fais pas ça » mais là rien à avoir avec le thème donc non, pas là, non.
Bon ok, on reprend aussi quelques recettes des familles en matière de série US policière grand public, car c’est souvent, aussi, un méchant (mais qui en fait au départ quand il a témoigné était SUPER gentil que non non non tu peux pas te douter que c’est lui tellement…vendeur en magasin de Hi-fi DVD, tout ça tout ça) a tué une pauvre strip-teaseuse prostipute dans un troquet de Las Vegas Sacramento tenu par un gars d’origine latinos indienne mais qui en fait est de mèche avec les russes mexicains car les russes mexicains ils ont quand même toujours SUPER super méchant pas beau. (Youuuhoooouuuuuuu, je viens de remplir ¼ de page grâce à un copié collé, z’avez rien vu hein !!!!).
Mais avec The Mentalist, y’a un fil rouge, d’ailleurs c’est pas un fil, c’est un John qu’est rouge. Un peu comme Fox Mulder dans X-Files qui, entre deux enquêtes paranormales, recherchait sa sœur qui avait été enlevée par des extra-terrestres méchants méchants (devaient être russes ou mexicains d’ailleurs). L’a jamais retrouvée…mais là Le Mentalist, l’est pas loin de le retrouver le John. Pour mémoire, c’est celui qui avait tué sa femme et sa fille y’a des années, pour ceux qui suivent pas, bref, on s’en fout.
Question, c’est qui ce John le Rouge, bordel. Bon, à l’heure d’aujourd’hui, y’a une short-list, a priori, ça serait un flic, et oui déception car compte tenu du nom du gars, on aurait très bien pu imaginer qu’il s’agissait :
- D’un vendeur de chez NICOLAS, spécialisé dans le Bordeaux Cru Bourgeois qui tâche, pour 2 cartons achetés 1 carton offert, à quelques jours des foires aux vins, ça aurait été commerçant.
- D’un communiste révolutionnaire adorateur de Salinger qui aurait échappé au McCartisme
- De l’inventeur des pions rouges dans le jeu Puissance 4, frère de Mickael Yellow, inventeur des pions ennemis
- D’un fan de
Jeanne Mas, mais qu’à moitié, sinon il se serait appelé John Rouge&Noir
- De l’auteur déçu de MC Solaar, qui avait changé une lettre à sa chanson originelle « Rouge de là », et que du coup fou de rage, il a bougé de là, parti aux States et a tué la femme et la fille du Mentalist en fredonnant le tube
- D’un bâtisseur de moulin de la même couleur dans des quartiers chauds de Paris
- Du fils de Rackham, frère de
David et beau-frère de Victoria. (vanne niveau 1 force 4)
- Ou encore un fabricant de petits chaperons, agacé par les contrefaçons des chinois, qui auraient, en plus, renommé le produit petit chaperon jaune.
Voilà, bah non, a priori, c’est pas ça…donc réponse bientôt dans The Mentalist, en attendant, bah bonne semaine, moi je regarde Mad Men.
Hôtel Europe, de BHL au Théâtre de l’Atelier
Signé Bernard Henri Lévy, le texte profite d’une lecture habitée par Jacques Weber sur les planches du Théâtre de l’Atelier. Un bavardage sans grand intérêt qui parasite la profondeur de ses idées sur l’Europe. (suite…)
Hippocrate
C’est du cinéma à hauteur d’hommes. Au début, on s'inquiéte un peu: les premiers plans filment la nuque du héros. Depuis Elephant, tous les cinéastes pensent que ca fait intelligent de filmer le dos des protagonistes. Heureusement tout se devine dans le regard des comédiens, vrai sujet du film : les dilemmes, les illusions et les espoirs de deux internes en médecine. L’un est le fils d’un docteur renommé. Le second est plus expérimenté. Tous les deux découvrent que la vie quotidienne à l’hôpital les affecte.
Cela rappelle les écrits de Martin Winckler, passionné de séries et écrivain populaire. Il y a ici que des hommes en blouse face à des doutes professionnels et des cruelles histoires de médecine. Un vieil alcoolo et une dame en fin de vie vont bousculer lesconvictions des deux docteurs.
Le film pourrait être cruel à son tour. Il parachute le spectateur dans un univers difficile où les coupes budgétaires ont une réalité immédiate, où l’ambiguïté peut se révéler fatale. Médecin généraliste, le cinéaste Thomas Lilti connaît bien le monde hospitalier. C’est criant de vérité entre les carabins endiablés et l'ambiance particulière des hôpitaux.
Mais ce n’est jamais misérabiliste. Hippocrate est une œuvre romanesque, où les personnages sont parfaitement développés. Le petit jeune (toujours épatant Vincent Lacoste) est attachant tout comme son cadet (meilleur acteur actuel, Reda Kateb), plus mûr mais tout aussi idéaliste.
Finalement ils mènent un combat. Pour la dignité. La morale. Le film fait un constat avec une simplicité presque humoristique. La justesse se mêle au rire. Et à la tendresse. Ce n’est pas qu’une description froide. Le destin de ces deux anti héros est attachant.
L’ensemble est un peu caricatural dans son engagement (on dirait du Ken Loach de temps en temps) mais les choses sont dites avec une réelle passion et un amour pour le récit qui fait franchement plaisir à voir. Avec tous ses films qui tentent de nous anesthésier, cette soudaine réanimation du cinéma français donne de l’espoir et de la joie ! Ce n’est pas tous les jours que l’on peut dire ça en sortant de l’hôpital.
De Nicolas Litli avec Vincent Lacoste, Reda Kateb, Marianne Denicourt et Jacques Gamblin - Le Pacte - 3 septembre 2014 - 1h39
Afrique(s), Pascal Maitre, Maison européenne de la photographie
Attaché à saisir la diversité du continent africain souvent réduit à certaines de ses facettes, le photographe français Pascal Maitre nous livre à la MEP quelques uns de ses tirages mêlant beauté, mystère, effroi et fascination. (suite…)