Avec BAC Nord, vous allez prendre une grosse claque !
Film événement de la rentrée, BAC Nord nous narre le quotidien de trois « baqueux » de Marseille, Antoine, Yassine et Cyril. Trois potes aux caractères différents, mais qui sont inséparables à force de passer leur vie ensemble à arpenter Marseille dans leur bagnole et à traquer les voyous. Leur quotidien est rythmé par des interpellations de délinquants assez minables (vendeurs de tortues à la sauvette, voleurs de scooter…) dans une ville aux allures de Tiers Monde.
Le film – porté par des comédiens tous impeccables et extrêmement convaincants – est magistral du début à la fin. Dans la scène d’ouverture, nos trois flics se donnent à fond pour interpeler le conducteur (sans casque) d’un scooter (volé) qui finit par leur échapper. Blasés par cet échec, ils décident de faire un « plan stup » : Antoine et Yassine enfourchent le scooter afin de pénétrer incognito dans une cité où, faisant mine d’acheter de la drogue, ils arrêtent le dealer qu’ils jettent dans la voiture conduite par Grégory qui les a rejoints entre-temps. Mais au moment de sortir de la cité, ils endommagent la voiture pour forcer un barrage de fortune, ce qui leur sera plus tard reproché par leur capitaine. « Un gros dealer ou un pickpocket, ça fait pas de différence pour (le Ministère) », leur dit-il. Il leur faut donc faire du chiffre plutôt que de chercher à être utiles.
Prise de risque, adrénaline. Frustration. Esprit d’équipe et petits arrangements avec la procédure. Tout est dit.
« Le terrain, c’est des frustrations ». « On ne sert plus à rien »
Ces histoires de flics découragés, décrédibilisés et impuissants face à des délinquants qui les narguent éhontément, on les connait par cœur et on les a déjà vues mille fois. Sauf qu’ici, on a l’impression de les vivre. On est avec eux, on est eux. Que peuvent-ils faire contre des coqs dont la testostérone est la seule valeur ? Comment composer avec une hiérarchie veule et changeante ? Comment ne pas tomber dans des petits arrangements coupables (une cartouche de cigarettes de contrebande ou un kebab offert par ci, un barrette de shit confisquée puis fumée par là) ?
Le portrait qui est fait de la France est triste à pleurer. Tout est dans un état lamentable : les « quartiers » comme les institutions (police, prison, politique). Le décalage est saisissant entre la misère ambiante et le cadre magnifiquement de la Méditerranée.
Et lorsqu’enfin ils donnent l’assaut dans une cité, on tremble pour eux ; la tension est presque insoutenable dans une scène de guérilla urbaine d’anthologie.
Ce film est un modèle du genre et le réalisateur Cédric Jimenez n’a pas à rougir, même face à Martin Scorsese, Michael Mann ou Ridley Scott.
Drame, Policier
Sortie nationale le 18 août 2021
104 minutes
Festival de Cannes 2021 : sélection officielle, hors compétition