Cannes, en fait on s’en fout, non ?
Mesdames messieurs, revoilà c’est fête, c’est senteur estivale, c’est festival de Cannes !
Je vous vous vois de là, vous, fans inconditionnels de cinéma iranien, de films d’auteur franco-belges où ça parle en flamand une phrase sur deux et que « c’est ça qui donne la force profonde aux sentiments de ce jeune acteur moldave tellement vrai de vérité vrai et tellement saisissant que les
marches du palais en pleuraient d’émotion de bouleversement »…
Vous qui suivez passionnément ce Festival de Cannes, tellement beau, tellement chic, tellement tendance, oui mais tellement chiant en fait…
Et oui, chaque année, Cannes devient pour quelques dizaines de super hype fashion mega trendy boys and girls LE LIEU où il faut être… oups pardon, The place to be…mais pour des millions d’autres, de Brest à Cergy en passant par l’Alsace et la Lorraine (que vous n’aurez pas d’ailleurs) bah en fait…on s’en fout, non ?
Chaque année, ramdam, paillettes et robes longues au programme pendant près de 15 jours sur Canal +, en direct des marches, en clôture de tous les JT, mais en fait, on s’en tape, non ?
Chaque année, Cannes devient l’épicentre d’une petite planète médiatique aux narines toutes blanchies par l’écume de la méditerranée pour tenir le choc des nuits de tournage, bah oui d’accord mais nous on bosse demain et des enfants à emmener à l’école, donc l’épicentre médiatique on s’en balance, non ?
Chaque année, des dizaines de post sur Facebook ou sur Twitter pour buzzer sur la dernière
conquête nocturne de Beigbeder ou la dernière photo d’un chroniqueur du Grand Journal farci raide de mojitos shooté dans les toilettes de la soirée d’une marque de chaussures ou de montres, là parce que le cinéma à Cannes c’est quand même quelque chose d’à part et comme le Dircom de la marque de montres ou de chaussures est un mec super branché cinéma d’Amérique du sud depuis qu’il a sauté sa stagiaire d’origine bolivienne, et bah il vient à Cannes avec toute son équipe malgré la crise… Wouahh, cool, il est trop fort…
Mais nous en fait on a fait un barbecue avec des potes samedi soir, au soleil, on était 20 et c’était vachement bien et détendu, donc le Dircom de la marque de montres ou de chaussures qui est fan de cinéma bolivien et qui saute des stagiaires…bah en fait on s’en fout carrément, non ?
Chaque année, on nous dit que ce jeune cinéaste japonais du nom de Hirovatani Chidansonslip a un talent fou qui devrait l’emmener vers les hautes sphères du cinéma nippon, tel que pouvait l’être le réalisateur aujourd’hui quasi centenaire Hirotavunu Cunulechemoi, lui aussi japonais, et qui avait tourné en 1967, grande année en matière de cinéma asiatique, le célèbre film « Hiro a vu l’amour derrière un galet qui sentait le sable », wouahhh, c’est trop beau, tellement d’émotion palpable dans les boîtes de Cannes le soir… que bah…en fait nous regarder des films japonais ça nous fait ch*** et ça faisait déjà ch*** nos parents en 1967… alors en fait on s’en fout, non ?
Chaque année, on nous explique sur I-Télé et BFM Tv qu’être membre du jury du Festival, c’est quand même super fatiguant, carrément éreintant et qu’à raison de 2 voire 3 films par jour (et ouais quand même c’est dingue quoi !!!), les membres du jury sont quand même super contents que ça se termine.
Bah oui, tu penses on les comprend ! Comment ça doit être dur, on n’imagine même pas !
D’ailleurs mon voisin de quartier dont la femme fait maintenant des ménages depuis qu’elle a perdu son taf y’a 1 an suite à la restructuration de sa boite me disait justement qu’en se levant à 4h du mat’ jeudi dernier elle avait eu une larme à l’œil pour les membres du jury du Festival tellement ça devait être dur ! Merci pour cette pensée, je suis sûr qu’ils sont très touchés les membres du jury.
Chaque année, Cannes, en fait, c’est beau, c’est bien, mais en fait on s’en fout carrément.
Vivement l’année prochaine, hâte de s’en foutre encore.