Corruption. Fraude. Malversations. Tout ce qu’on aime dans ce thriller palpitant et terriblement réaliste.
Pas besoin d’avoir beaucoup d’imagination pour penser El Reino, chronique d’un politicien véreux, pris la main dans le sac. Il suffit de penser à quelques faits divers pour se rappeler que le pouvoir donne des suées à certaines personnes qui oublient très vite le sens de la politique…
Bref, on ne va pas refaire le monde mais ici, on va le découvrir de l’intérieur, ce monde opaque où les pratiques douteuses se cachent derrière de jolis mots.
Que dios nos perdone, le précédent film de Rodrigo Sorogoyen, était un polar. Un vrai. Un couillu. Un noir de chez noir. Un film vraiment trouble où brillait déjà le comédien Antonio de la Torre en policier aussi borderline que l’assassin qu’il recherchait.
Cette fois ci il joue (avec une énergie passionnante) un conseiller régional promis à un grand avenir dans une Espagne qui ne connait pas la crise! Bien sous tout rapport, son image se ternit lorsqu’une discussion louche entre lui et un employé sort dans la presse.
Il devient le plomb que le parti veut faire sauter. L’homme se révolte et se rend compte que l’amitié en politique, ca n’existe pas. Petit à petit, son monde s’écroule et le désespoir le mène à accomplir des actes de plus en plus dangereux.
Et le film partira d’un triste constat à un nouveau polar angoissant et désespérant. Filmant au plus près de son (anti) héros, le réalisateur nous étouffe entre les infos et l’immédiateté. C’est voulu. C’est très bien fait.
Ca ressemble beaucoup à de la virtuosité. On se demande si le cinéaste n’en fait pas un peu beaucoup mais il fait discrétement un détournement de style, plongeant notre véreux personnage central dans des eaux de plus en plus sombres.
L’air de rien, le discours politique et dénonciateur sert un projet narratif plus intéressant car les apparences sont évidemment trompeuses. Parce qu’un film noir aujourd’hui, ce n’est plus une femme fatale que l’on croise ou désire mais une journaliste élégante.
Le film de genre réinterpréte une certaine réalité que l’on déplore. Le regard devient différent. On se met à aimer un vrai ripou sans scrupule. La morale disparait petit à petit. Le piège n’est pas qu’à l’écran mais le cinéaste nous met en face de notre propre ambiguité. C’est captivant. Un peu long. Mais il ne faut pas louper ce polar qui rappelle la nécessité d’un art pour appréhender le réel!
Avec Antonio de la Torre, Monica Lopez, Barbara Lennie et Nacho Fresneda – Le pacte – 17 avril 2019 – 2h11