Dans cette comédie sociale sur fond de prolétariat du Nord de la France, Emmanuel Courcol évite habilement les grosses ficelles et les gros clichés. Il signe un film délicat et respectueux des gens simples (« ceux qui ne sont rien », comme disait le Président Macron) et montre que ce n’est pas parce qu’on vient d’un coron qu’on ne peut pas avoir l’oreille absolue. (Si vous avez un doute, pensez donc à Sofian Pamart ou à Georges Prêtre !)
Dans ce film intelligent, les personnages sont, chacun à leur tour, faillibles, fragiles et ingrats. Mais ils ne sont pas caricaturaux ; il n’y a pas de critique sociale au gros sel. Le réalisateur marche sur un fil sans jamais tomber dans la facilité. Il met en valeur la beauté fruste mais réelle du Nord et de ses habitants. En fanfare est un feel good movie politique. Il n’y a ni condescendance ou misérabilisme ni haine facile du bourgeois. Emmanuel Courcol propose un regard tendre sur la France et offre une heure quarante de concorde qui fait du bien au moral.
Le film est servi par des comédiens tous excellents, qu’ils soient professionnels ou amateurs (attention, dans cette harmonie il y a des pièges : Jacques Bonnafé, par exemple, n’est pas un musicien comme les autres !).
Le casting et la direction d’acteurs sont remarquables. En grand professionnel qui maitrise parfaitement son interprétation, Benjamin Lavernhe – de la Comédie Française – est parfait dans le rôle Thibault, le musicien aussi talentueux que besogneux. Même adéquation avec le rôle du côté de Pierre Lottin dont le jeu, plus instinctif, colle bien au personnage de Jimmy, ce musicien taiseux au don inné. J’aime de plus en plus Pierre Lottin, un comédien ayant débuté au cinéma dans les Tuche et qui, depuis, ne cesse de se colleter avec des personnages complexes qu’il incarne toujours avec puissance. Sarah Suco, quant à elle, est touchante dans un beau rôle de jeune femme combative.
Le film est drôle, même s’il aborde les notions d’inégalité, d’ambition, de revanche… Et avec l’air de ne pas y toucher, il se fait presque philosophique lorsqu’il pose la question de savoir, au fond, ce que c’est que d’avoir de la chance dans la vie.
Au cinéma le 27 novembre 2024
103 minutes