L’adolescent, Bastien, est presque fade dans la forêt profonde du Canada. La réalisatrice appuie malgré tout son regard sur ce jeune homme qui se voit grandir, et ça semble un peu l’embêter. On est encore plus dubitatifs devant la jeune fille qui va éveiller bien des choses chez Bastien. Chloé est fuyante. Pourtant la réalisatrice s’obstine à la suivre derrière sa capuche rouge et ses bêtises d’adolescente qui s’émancipe.
Ce couple est étrange tout comme la mise en scène de Charlotte Le Bon. On est très loin de la miss météo qui disait des gros mots ou de l’actrice qui voulait être autre chose qu’une jolie poupée. Formellement on pense souvent à Gus Van Sant avec un sens du cadre assez stupéfiant. Elle accroche en quelques plans le spectateur. Le trouble s’installe dans une nature pourtant hospitalière et… normale.
Elle semble avoir une technique pour cela : le rythme est lent. Très souvent, les images suggèrent. Elles interrogent. Charlotte Le Bon se refuse à la démonstration. Elle fait peut-être un peu trop dans l’évanescence mais son adaptation d’une bédé de Bastien Vivès est un spectacle de cinéma. L’émotion se cache bel et bien dans ces scènes que l’on a l’habitude de voir. Et pourtant.
Sa direction d’acteurs, la photo et la musique amènent un doux décalage à ce récit initiatique qui pourrait avoir des airs de déjà-vu. Les deux ados se rapprochent. Ils se domptent. Ils gomment leurs différences au fil des vacances au bord d’un lac sauvage.
Lui n’aime pas l’eau. Elle ne sait pas trop comment s’intéresser aux garçons. Le film par moments atteint cette poésie que savait capter un cinéaste comme Jacques Doillon dans son film Le Jeune Werther !
Le Bon cherche à filmer des états d’âme. Elle y arrive. Sans que ce soit chichiteux ou poseur. Film d’atmosphère, film sans adultes, on sent une grande liberté dans la réalisation qui vient suggérer la confusion d’un âge, la présence d’un sentiment…
Étonnant, Falcon Lake mérite une visite !
Au cinéma le 07 décembre 2022
Un film de Charlotte Le Bon
Avec Joseph Engel, Sarah Monpetit, Anthony Therrien et Monia Chokri
Memento International
1h40