Art-scène, Danse

Für die kinder von gestern, heute und morgen (2002), Pina Bausch

pina

 

La scène est immaculée une virginité trois ouvertures noires : deux portes une vue.

Si grandes ouvertures que les danseurs minuscules les mouvements immenses.

L’équilibre des corps balanciers les limites de la chute.

C’est la main qui retient le corps, c’est la chaise qui redresse l’homme à terre.

Le corps, ce miracle.

Une petite danseuse une très grande il y a ici et tout du long des déséquilibres des tremblements de cœur des certitudes et des normes. Des inversions.

Sur la scène blanche chaque corps possède cinq ombres.

La danseuse minuscule n’a qu’à bouger les doigts et c’est son corps entier qui danse.

On porte, à deux, à trois, des corps de femmes des corps d’hommes, des grands des petits des vieux des nous. Ils deviennent pont marée rivages, architecture ils épousent ils progressent ils volent culbutent.

Le corps, cette architecture.

Un solitaire s’élance et s’empêche, s’enivre se brutalise. Se décontrôle.

A distance il tire un fil invisible, articule et manipule la danseuse couchée jusqu’à ce qu’elle l’enlace puis debout toujours la conduit la dirige et lorsqu’enfin elle trouve son autonomie, c’est pour danser, nous danser.

Un cœur est un cœur est un organe et un LOVE

Le corps, cet amour.

Des corps-oiseaux, des bras-ailes des hanches porteuses une ronde de femmes volantes, déplacement d’air dans un tourbillon nous sommes emportés, le cercle de plus en plus large se fend, fondent sur nous les oiseaux ailes déployées, des corps qui ne s’arrêtent plus même assis sautent, tressautent.

Le corps, cet infini.

Au jeu de la corde à sauter les brutalités enfantines, au jeu de la corde lance-femme dans les bras, des étreintes des unions.

Une étreinte est un O – Un baiser un X

OXOXOXOX

Le corps, cette équation.

Tant de façon di dire « une étreinte », de dire « un baiser », tant de mouvement pour danser une étreinte, pour danser un baiser, tant de partitions pour s’aimer « Est-ce que tu m’aimes ? Je ne crois pas. Peut-on essayer, commencer par cinq minutes ? Cinq secondes. »

Tentative d’une demi-minute, c’est beau un couple qui s’aime une ½ minute, c’est long.

Le corps, cette éternité.

Perdre les mesures, mesurer de l’espace de son corps, de son amour.

Petits arrangements avec les sentiments, comportement animal.

Le corps, cet animal.

A chaque scène, à chaque danse, chaque musique, chaque mouvement, s’écrit un précis d’anatomie, l’anatomie de la danse, des corps, des invisibles. Précis d’anatomie, précis d’autonomie, des détails des séductions, des pommes rouges des chevelures rousses et brunes, des regards.

Le corps, cette séduction.

Se coiffer à la pointe de son talon aiguille, brûler les pages de son livres, prendre le feu dans ses mains, se cracher s’étreindre, une nuit et sa continuité impensée, impensable, des jeux cruels, des amours violentes.

Le corps, cette longue nuit.

Brûler encore, son pull à la cigarette, se brosser au balai, anatomie de l’image, un corps vieux en tutu nuage vaporeux et arrosoir, mû par un souffle, construire des châteaux de sable, faire avec la fragilité les éboulements, un bac à sable d’adultes.

Le corps, cette image.

Ruptures des phrases et des habitudes dites au corps et à la bouche, les mots de la fin, le disque rayé des sentiments. Corps de femme avec adjonction de bras d’homme, les murs bougent, les armoires roulent, les danseurs tanguent, mouvement ininterrompu, une ivresse, des codes renversés, on se serre trop fort ou trop loin, on se blesse on se délaisse, on cherche l’amour on le refuse, on s’accroche, on s’approche

Le corps, cette danse.

 

Für die kinder von gestern, heute und morgen (2002)

(Pour les enfants d’hier, d’aujourd’hui et de demain)

Jusqu’au 30 mai 2015

Théâtre de la Ville, Paris

www.pina-bausch.de/en/pieces/Kinder_von_gestern.php

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