Les festivals ont replié leurs tentes géantes et leurs saloons gonflables. Fini le beau ciel d’été. Les nuits qui tombent délicatement. On retrouve le charme chaud des salles et on se régale des ambiances différentes, parfois dans le même lieu. Les virées musicales et nocturnes retrouvent de la superbe !
L’Olympia invite des grandes stars mondiales jusqu’à l’obscur chanteur belge qui se prend pour un Italien. La programmation de cette salle est un poème. Populaire dans le sens le plus large du terme. Samedi soir, ce sont les exigeants Gogo Penguin qui s’installent dans la salle mythique.
Avec eux, le style est feutré, froid mais pas dénué d’ambitions. Le trio s’applique à faire chavirer son public. La base est classique : contrebasse, piano et batterie. La timidité des musiciens se laisse deviner, cachée par de très élégants effets de lumière.
Mais cela reste des gars de Manchester. Et le jazz qu’ils mettent en place possède une douce folie qui finit par envahir les corps. On peut appeler cela de l’electro jazz mais c’est assez réducteur tant les musiciens cherchent leur son.
Il pousse le jazz jusqu’à une transe acoustique et mélodique. Le public est conquis : c’est un groupe qui compte sur la toute puissance de ses instruments et nous emporte dans une nuit pleine de mélopées plus dansantes que jamais.
Quelques jours plus tard, ce sont d’autres oiseaux qui s’installent à l’Olympia. Les Black Crowes déboulent des Etats-Unis avec leur image de blues poussiéreux et leur rock piquant. Ils fêtent donc les trente ans de leur premier disque. Dans quel état pouvait être le fameux duo du groupe ? Les frères Robinson ont bien respecté la grande tradition du rock’n’roll : engueulades, séparations avec fracas, insultes, procès, addictions mais aussi grands disques de rock !
On devine donc la réunion commerciale entre Chris et Rich Robinson, mais on ne s’attendait pas à ce que le show soit si authentique. La voix de Chris est moins héroïque mais il s’acharne avec talent à imiter ses idoles de la soul music. Ça fonctionne. Tout comme Rich Robinson, guitariste passionné au mutisme assez fascinant. Autour d’eux des musiciens qui sentent bon le rock blues du sud des Etats-Unis. Dans un décor de rade prohibé !
Il s’agit donc de rock et de rien d’autre. Le groupe rejoue Shake Your Money Maker et reprend les hits. Le rythme s’accélère et les frères réalisent le set quasi parfait (malgré un son imparfait) : on se dit bien que ce sont les vieux pots qu’on trouve les bonnes recettes.
Mais celle qui semble bien avoir trouvé la magie du live, c’est bel et bien la Franco Nigériane Asa. Un soir d’automne. Le froid envahit enfin la ville.
Asa a commencé par une folk très worldwide puis petit à petit s’est concentrée vers des sons africains. On pouvait la penser perdue dans ses nombreux styles. Sur scène, elle semble un peu paumée derrière ses grandes lunettes et des bottes de cowgirl. Le concert commence avec une prudence presque inquiétante. Le public remue tout doucement sur des fauteuils et Asa semble perdue sur la scène.
Un titre réveille l’assemblée (quelle idée de proposer que des places assises) et c’est parti pour un show formidable. Aidée par une choriste proche et des musiciens diablement malicieux, elle nous embarque effectivement entre l’Europe et l’Afrique. Les chansons sont engagées et surtout percutantes. Les refrains sont des accroches pour ne plus lâcher le public qui va vite s’échapper des fauteuils. Heureusement. La communion est réelle. Elle se met à discuter sur ses années à Paris et imite à la perfection les Parisiens.
Toute l’humanité d’un concert se ressent pleinement. On se dit que ce doit être un effet post covid mais il est certain qu’Asa est responsable de tous ses bienfaits qui font rayonner l’artiste et ses musiciens. C’est un oiseau majestueux et délicat. Décidément les oiseaux de nuit, qu’ils piaillent ou qu’ils chantent, nous ravissent ces derniers temps!
Concert du 28 septembre 2022
La Cigale, Paris
Alias Production