Cinéma

Green book: sur les routes du sud

Inattaquable dans le fond comme dans la forme, Green Book est un film d’auteur! Bah oui!

Puisque Peter Farrelly est le créateur de quelques pétites du cinéma américain trash et rigolard. On lui doit avec son frère, Bobby, de gros succès comme Mary à tout Prix ou Fous d’Irène. Ils pratiquèrent l’humour comme un élément subsersif et un révélateur d’un humanisme tout terrain. Leurs films sont bien barrés, incompris chez nous et souvent assez touchants derrière les grosses pantalonades.

Ils sont responsables de quelques nanars aussi, mais ici, Peter Farrelly s’émancipe de son frangin pour changer la formule. Fini la blague graveleuse! Fini le cabotinage forcé! Fini la comédie débridée: Peter Farrelly fait dans le classicisme désormais.

Il s’applique à reconstituer l’ambiance des années 60. Les belles voitures. Les beaux brushings. Les beaux costumes. La photo est incroyable. La musique accompagne cette époque: le Dr Don Shirley, pianiste noir, a le courage et la volonté de faire une tournée dans le deep south où la ségrégation est considérée comme une « tradition ancestrale ».

La maison de disques ne veut pas laisser partir seul son génie du piano dans cette aventure. Il le confie à Tony Lip, videur de boite de nuit rustre, au chomage technique. Ce natif du Bronx va évidemment faire des étincelles en face de l’artiste esseulé.

Viggo Mortensen joue l’Italien du Bronx. Il ne fait pas dans la nuance mais le comédien n’est pas du genre à faire dans la facilité. La grosse brute est finalement généreuse. En face de lui, Mahershala Ali a tout simplement la classe en virtuose de la musique, condescendant et lettré.

Les deux hommes embarquent pour un road movie où leurs différences vont se révéler être une force face à la bétise ancestrale citée plus haut. C’est inattaquable dans le fond. Peter Farrelly n’a jamais été avare en bons sentiments. Et ici, cela fait plutôt du bien. Il sait éviter le sentimentalisme crasse. Le sens du détail comique est une qualité pour celui qui se confronte à un mélo plus classique. L’Italien n’est pas si bête et le musicien n’a pas que des qualités.

Après ses comédies plus ou moins réussies, il continue de développer ce thème de l’humanisme forcé. Il observe encore et toujours l’individu face à la conformité. Il se place dans une tradition narrative et nostalgique, qui évidemment ne manque pas de charme. Ca pourrait être facile, paresseux mais c’est enthousiasmant.

Farrelly va chercher Frank Capra et réussit à éviter les pièges du joli livre d’images. Ce n’est pas Miss Daisy et son Chauffeur. Un discours en faveur de la tolérance est terriblement nécessaire aujourd’hui. Comme le dit le personnage principal: ce n’est pas le génie qui impressionne, c’est le courage! Faire un tel film est très audacieux, malgré les apparences!

Avec Viggo Mortensen, Mahershala Ali, Linda Cardellini et Sebastian Maniscalo – Metropolitan filmexport – 23 janvier – 2h10

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