Une belle voix élégiaque. Une batterie à contre temps. Des violons sur une pente savonneuse. Le premier morceau de cet album intrigue. On est bien loin des canons commerciaux. Le rythme lent provoque une certaine élégance: la voix qui se fait entendre pourrait facilement en faire des tonnes et c’est la retenue de « Feel You » qui finit par nous convaincre de poursuivre l’écoute.
Voilà donc une pop atypique, qui ne veut pas ressembler aux autres. Ce que confirme « Silhouette » le second titre du quatrième album de cette chanteuse de Los Angeles méconnue chez nous, Julia Holter! Une fois de plus la voix semble venue d’ailleurs et l’orchestration joue sur sa simplicité et son efficacité.
Toujours aidée par des cordes tendus, l’artiste réalise le rêve de pas mal de jeunes filles: exister. Sans grand artifice, on devine une vraie personnalité. « How Long » est une belle idée de musique contemplative. Une vraie preuve de culot!
Par son exigence, la suite de l’album va juste nous faire à l’idée que Julia Holter appartient à cette famille admirables de femmes qui ne se laisseront pas faire. Ses chansons se succèdent et nous amènent à se rappeler Kate Bush, Laurie Anderson ou Fiona Apple. Des références éclatantes mais qu’elle assume.
On ne s’ennuie jamais malgré sa voix étrange, unique en son genre. Il y a une vision ici étrange de la pop, de la musique, du chant. Les mélodies sont montées bizarrement mais jamais n’importe comment. C’est avant gardiste mais avec une vraie envie de faire plaisir à l’auditeur. Pas de provocation gratuite. Elle prend des risques mais tout est sous contrôle.
Ambitieuse, Julia Holter est visiblement intelligente et courageuse. Cela se ressent dans ses chansons qui se succèdent et multiplient les idées culottées comme un vieux saxo digne des années 80 et des échappées jazz. C’est élégant. Chaque chanson finit par surprendre. Par petites touches. L’air de rien. L’humilité en avant. Rien de plus.
Domino – 2015