Et si Jacques Higelin était le Neil Young français? Un disque étrange, fou et présomptueux!
Comme le fameux Canadien, le papa de Izia a une capacité à se renouveler, tout à fait stupéfiante. A 75 ans, il refuse la retraite polie et sage. Il est encore un explorateur de la musique. Il ose encore là où beaucoup prospèrent sur une gestion sage d’un patrimoine. Higelin se met en danger et décide de secouer ses fans et les amateurs de variété française.
A 75 ans, Higelin est à la recherche de sa jeunesse, celle des années 70 où l’on n’avait pas peur d’expérimenter. Franchement ce disque est inclassable. Un adjectif usé par la critique mais le bonhomme n’a pas peur de sortir de sa zone de confort. Il est le parrain d’une certaine scène française. Il est le papa de beaux artistes. Il s’en fout: il poursuit son aventure folle, un peu punk et toujours passionnante.
Il y a ce visage sur la pochette, usé par le temps, marqué mais on remarque aussi ce regard perçant. Higelin vieillit mais ne change pas. Il ne laisse toujours pas indifférent. Il y a encore de la poésie en lui. C’est évidemment un disque au crépuscule d’une vie mais qu’est ce qu’il est vivant.
On retiendra ce titre de plus de vingt minutes (autre point commun avec le Loner) mais les autres sont longs eux aussi comme si Higelin faisait durer le plaisir. Il est un peu plus sombre que d’habitude mais musicalement, c’est riche: il est aidé par l’excellent Rodolphe Burger et l’indispensable Edith Fambuena.
Les musiciens montent donc un cirque sonore, où Higelin fait le clown. Il n’a pas peur d’être triste. Comme Nick Cave dans son tout dernier disque, la création permet d’exorciser et d’échapper aux peurs. Il en sort quelque chose de fort et de sincère. Il n’est pas content. Il est touchant. Il s’emporte puis se fait affectueux. On est pris aux tripes. Il faut peut être plusieurs écoutes pour s’habituer à cette poésie bizarre mais la folie créatrice d’Higelin fait du bien aux oreilles et au moral.
SME – 2016