Myriam Boyer a un parcours peu commun pour une comédienne : d’abord dactylo, cette jeune ouvrière bijoutière lyonnaise se blesse gravement et s’intéresse alors au théâtre. Figurante au départ, elle prend ensuite des cours et intéresse Agnès Varda puis Jacques Demy. C’est dire son talent dès le début.
Et la voici remarquée au cinéma par Alain Corneau dans « Série noire », dans lequel elle interprète la femme de Patrick Dewaere. Elle y reçoit un César pour ce second rôle.
Les rôles au cinéma comme au théâtre s’enchaînent, ainsi que les récompenses, dont un premier Molière.
Et en 2008, c’est la consécration avec un deuxième Molière, pour « La Vie devant soi » d’Emile Ajar, une pièce à laquelle j’ai eu la chance d’assister au théâtre Marigny.
Je l’ai revue au théâtre Hébertot en 2018, dans Misery, où elle interprétait de façon magistrale Kathy Bates, l’héroïne absolument effrayante de Stephen King.
Il y aurait tant de choses à écrire sur cette femme, cette artiste atypique et discrète.
Car oui, au cinéma comme au théâtre, Myriam Boyer est à part. Et ses rôles aussi.
Dans « Juste un souvenir », elle nous emporte cette fois dans un autre univers, fait d’un long monologue accompagné de pas mesurés ou plus rapides ou encore, assise sur une chaise, un sac à la main. La voix est parfois précise, le visage souriant et soudain, le ton se fait triste, nostalgique. Un phrasé qui rappelle l’avant, du temps des premières radios et du music-hall.
Charles Cachant (« Où sont tous mes amants »), Raymond Queneau (« Si tu t’imagines »), et Charles Trenet, Lucienne Boyer ou encore le sublime « Est-ce ainsi que les hommes vivent » d’Aragon… Que de beaux textes ! Sans oublier sa façon impayable d’interpréter « La dame de Monte-Carlo, » de Cocteau, sur laquelle elle virevolte, bouge, sourit, et ses gestes, ses expressions, font entrevoir d’une autre façon ces chansons dites réalistes et parfois un peu amères.
Bien sûr, ces mots qu’elle dit avec douceur et cœur appartiennent d’abord aux auteurs. Mais pour qui aime cette époque, impossible d’oublier leurs interprètes, de Fréhel à Mouloudji, de Patachou à Charles Trenet… Et c’est cette grande comédienne qui nous apporte aujourd’hui sur un plateau ces histoires d’amour déçu, de femmes blessées et de gaieté parfois. Le public la suit, écoutant ces chansons du temps d’avant en retenant son souffle.
Théâtre de Poche Montparnasse
Tous les dimanches à 15 H
Durée : 1H 10
de 10€ à 28 €