A l’heure où la Syrie est en permanence au coeur de l’actualité, Jean-Pierre Filiu et Cyrille Pomès nous font vivre dans un récit haletant et nerveux les premières heures de l’insurrection contre le régime de Bashar al Assad. C’est poignant, intelligent, on est proche du »Quatrième mur » le récit de Sorj Chalandon qui racontait le massacre de Sabra et Chatila.
Nous sommes en 2013. Nous sommes dans le quartier de Daraya, dans la banlieue sud ouest de Damas. Les auteurs nous offrent toute une galerie de portaits des gens ordinaires qui peuplent Daraya. En parallèle on perçoit le poids du régime qui pèse sur cette population en quête d’émancipation et de liberté. Mais voilà, les tenants du régime ne sont jamais bien loin et les moindres signes d’opposition sont rapidement réprimés.
Au fur et à mesure du récit on sent la pression contenue qui prend forme, qui monte, et finit par exploser. Si les auteurs tentent de nous donner une vision d’ensemble de la révolution, ils arrivent au travers des personnages du quartier à humaniser leur propos et la grande histoire se confond avec celle de quelques uns.
Le dessin de Cyrille Pomès est vif, nerveux, proche de celui de Astier par moment. Le côté monochrome y contribue. Je n’irai pas jusqu’à dire que ce dernier serait un hommage (modeste?) au Guernica de Pablo Picasso, mais j’y ai quand même pensé. C’est une sorte de reportage dans le quartier. Les personnages ne sont pas des héros, mais bien des gens de tous les jours qui ont décidé de se rebeller.
Les faiblesses de chacun y sont aussi présentes, comme les petites mesquineries ou les intérêts personnels. Ce côté très humain du récit contribue à ce que la chute n’en soit que plus terrible.
Un récit difficile, exigeant, très interessant à l’heure où les atermoiement des européens sur le sort de ces populations est au coeur des préoccupations.
La Dame de Damas – Futuropolis – 104 pages