À lire d’urgence, un petit bijou d’humour, de finesse et de sensibilité. La littérature anglo-saxonne est décidément toujours aussi surprenante.
Il y a des livres qui vous accrochent rien qu’avec leur titre. Et celui-ci ne peut que retenir l’attention : La femme qui décida de passer une année au lit. Mais un titre n’est rien s’il n’y a pas d’histoire derrière. Et Sue Townsend ne nous déçoit pas. Cette Anglaise née en 1946 à Leicester avait déjà fait parler d’elle, pas seulement avec ses livres pour la jeunesse, mais aussi grâce à son style caustique, voire franchement drôle. La Reine et moi, un de ses ouvrages précédents, imaginait le déménagement de la famille royale en banlieue, excusez du peu. Tout simplement hilarant.
Ici, c’est une histoire de tache de soupe sur un fauteuil qui déclenche tout. Eva, bientôt quinquagénaire, réalise soudain que sa vie lui échappe depuis bientôt vingt ans. Elle est une mère et une épouse modèle, certes, mais elle s’est surtout perdue de vue, ne sait plus ce qu’elle aime ni ce qu’elle veut, ce qu’elle attend de l’existence. Elle décide donc de se coucher et ne bouge plus de son lit.
Les situations cocasses et loufoques vont alors s’enchaîner, de la famille perplexe aux enfants ingrats en passant par les admirateurs qui s’installent par centaines devant chez elle. Le mari et les voisins s’y mettent aussi. Bref, tout dérape, son geste est (mal) interprété et elle ne contrôle plus grand-chose. Critique acerbe et pertinente de notre monde dominé par les nouvelles technologies, observation juste d’une époque où les illuminés en mal de repères sont légion, cet ouvrage est un régal. Les cyniques semblent les plus forts, les opportunistes n’ont plus aucune morale, mais finalement, les perdants ne sont pas ceux qu’on croit. Fable folle, conte tendre et saugrenu, ce livre est aussi très émouvant. Beau, tout simplement.
Marie Léon
Sue Townsend
10-18- 470 pages