Art-scène, Théâtre

la imaginacion del futuro, la-resentida, Abbesses

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Engagée dans un théâtre politique, la compagnie LA RE-SENTIDA nous impressionne toujours autant par son énergie bouillonnante et son hystérie « sous contrôle ».

Vue au Nouveau Théâtre de Montreuil en octobre dans « Tratando de hacer una obra que cambia il mundo« , la compagnie LA-RESENTIDA est à nouveau au programme du Théâtre de la Ville, Paris, dans une création mise en scène par Marco Layera: « LA IMAGINACION DEL FUTURO ».

La jeune et brillante troupe s’attaque cette fois à son mythe national: Salvador Allende. Les années de socialisme démocratique (installé au pouvoir par les urnes) au Chili furent brèves (de 1970 à 1973) et enthousiasmantes, vivante alternative aussi bien au communisme totalitaire qu’au capitalisme libéral. La fin d’Allende et de l’expérience socialiste chilienne furent atroces, Allende se donnant la mort dans son palais assiégé par l’armée, et le pouvoir se trouvant entre les mains bientôt sanglantes d’Augusto Pinochet. 24 ans après sa passation de pouvoir et 8 ans après sa mort, après une lente transition vers la démocratie, la troupe interroge ce passé et en particulier la figure héroïque d’Allende. Mais interroge aussi notre présent, notre pseudo-démocratie où l’indifférence a pris le pas sur la solidarité. Et en cela, interroger le Chili d’aujourd’hui revient à interroge l’Europe d’aujourd’hui. Comme s’ils se demandaient: que serions-nous devenus si Allende s’était maintenu au pouvoir jusqu’à aujourd’hui? Lui, serait-il devenu un vieux semi-dictateur accroché à son fauteuil de commandant en chef? Ou un pantin entre les mains de ministres, professionnels de la communication? Que serait devenu le rêve socialiste pacifique confronté à la réalité de la mondialisation?

Ils imaginent, transposent, expérimentent, et donnent à voir une sorte de spectacle total halluciné… car ces comédiens se font par moments danseurs de hip hop, slameurs (au cours d’un hommage fantasque au Président), cascadeurs dans les nombreuses bagarres entre Ministres, marionnettistes (dans une scène de confession émouvante, celle d’une enfant victime de la dictature à venir); ce sont tous de formidables performers, les femmes en particulier sont belles, puissantes et s’exhibent. Le style tient de l’expressionnisme (scandale, grimace, hystérie violente) et du burlesque, comme une parodie sombre de cabaret: des moments de très bon divertissement (show musical ou comique) auxquels on tordrait le cou. On tremble un peu de honte et de peur mêlées.

Marco Layera exprime ainsi sa vision:

« Le théâtre peut amuser et ne pas être superficiel. Aucune opposition n’existe entre le fait de faire réfléchir et celui de faire rire ; ces termes ne sont pas dichotomiques. D’autres points de vue peuvent s’ouvrir : ceux de l’ironie, de la cruauté, de l’absurde et de l’humour. Ils ont un pouvoir beaucoup plus inquiétant et corrosif, et qui en somme font réfléchir. »

 

Découvrez ou redécouvrez cet engagement décapant

au Théâtre de la Ville, les Abbesses,  jusqu’au 11 décembre 2014.

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