Art-scène, Théâtre

L’Avant-dernier des Hommes, Valère Novarina, Lavoir Moderne Parisien

 

 

 

Une soirée en deux mouvements et milliers de mots :

1. Lecture d’Une langue inconnue par l’auteur, sa voix et celle du violon de Mathias Levy, pas un dialogue, un chœur un chant deux langues.

Novarina il élève le cahier chargé de son écriture jusqu’à nous, il projette sa voix vers nous, une voix biographique, l’origine d’un langage, l’énumération d’une vie qui commence avec la naissance de la mère et la naissance du fils et la chanson hongroise, lieu des premières émotions linguistiques et acoustiques, terre du départ.

D’où s’énoncent et s’enroulent les histoires de langue, maternelle donc, et aussi les langues étrangères déportées exterminées dérivées nourricières manquantes traçantes aventureuses enracinées, toutes les langues qui bruissent autour de l’homme qui tend l’oreille. Elles écrivent la fiction de l’enfant Novarina sa feuille toujours tendue vers nous il nous donne sa voix à voir à boire à mâcher à écouter, sa langue d’animal, « la bête respiratoire saisie dans la cage de la scène », le violon comme un animal pris au piège couine et stridule, s’échappe et se déploie, l’éventail sonore ouvre une cartographie de la langue où les frontières se chevauchent, où les verbes se multiplient, une langue paysage, une langue du paysage patois, une langue dé-policée qui marche absorbe, les paysages se modifient à chaque pas à chaque génération.

Le personnage c’est la langue, Novarina c’est la langue.

La richesse des mots sonnants et trébuchants.

Le mouvement de la parole sa course sa lenteur.

Sa résistance face à l’écriture numérique sa norme.

Choisissez : tête baissée sur l’écran ou tête relevée de l’air plein les naseaux galoper et chanter une chanson hongroise.

Dans cette allégresse voici le solo du violon cette langue qui monte et qui descend, danse et gémit, frotte et cisaille, unifie.

Cette langue du geste et du corps.

 

2. Puis s’approche L’Avant-dernier des Hommes c’est Claude Merlin l’avant-dernier c’est lui entre les murs marqués d’histoires du Lavoir Moderne, les murs éclairés comme des peintures, l’avant-dernier des hommes s’approche avec sa lampe de poche qui éclaire les premiers mots, spéléologue il entre dans la caverne de la scène déverse son sac sur la table son sac de fragments, son sac d’objets son sac de mots il déverse la langue sur la table ça tombe ça s’empile ça remplit ça fait du bruit ça démarre.

Le vertige de l’homme l’animal la langue la pierre tout se percute se répercute jusqu’aux murs et retour dans la bouche et les oreilles

Les objets ont des oreilles si l’homme à une bouche tout communique

Le sujet les objets leur nom quel casse-tête quelle puissance le mot sa déferlante ses paradoxes ses inventions

La parole en forme

de corps

de cadavre

d’avant-dernier

de premier

de mien

de tien

le lieu du corps ses trépidations ses phrases

celles qui coulent se taisent

de la bouche aux pieds à la table

La langue son bruit, la langue de l’objet qui roule traverse la scène à sa suite le corps traverse la scène en parlant ils traversent nos vies, les voix les histoires avec des conjugaisons des périphéries elles traversent nos ouïes

Nous traversons

une forêt de langues de paroles de sens

sortir du langage y revenir s’y cacher s’y blottir s’y retrouver

la parole dans son instant -le son- dans son immortalité – le sens-

le sens premier les sens cachés

Se réunir sans cesse se réunir, lutter contre l’éclatement le morcellement la perte du sens

Pourquoi ‘sang’ se dit ‘sang’ s’écrit ‘sang’ ?

L’éclatement du corps de la pensée sous l’afflux des mots si nous étions objet quelle stabilité

Tandis que les trinités de mots en déroute, il y a une histoire derrière tout ça, une histoire de famille, d’accident, d’objets, une vie par les objets leur nom.

Des mots.

Lorsque le dernier mot s’éteint le public applaudit le fabuleux comédien secoué de mots s’incline devant les objets acteurs remplis de mots ils saluent, tous et un par un, sous les applaudissements.

 

L’Avant-dernier des Hommes

De  Valère Novarina

Avec Claude Merlin

Mise en scène Claude Buchvald

Lumière Yves Collet

du 21 novembre au 1er décembre 20118à 20h30

Précédé de lectures de Valère Novarina et de Mathias Levy au violon les 21 et 28 novembre

LAVOIR MODERNE PARISIEN

35, rue Léon Paris XVIIIème

 

 

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