La mort d’un ancien officier de police sert de fil conducteur à un roman qui vous hantera longtemps. Une dérive entre les errances de l’engagement politique et la peur de la mort tapie en chacun de nous.
Stefan Lindman est policier dans la ville de Boras en Suède. Il a 37 ans quand il apprend qu’il a un cancer de la langue et qu’il doit être traité en chimiothérapie. Dans l’espace de temps qui le sépare du début de son traitement, il passe par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. La proximité probable de la mort l’oblige à se questionner sur ce qu’a été sa vie – jusqu’à présent.
C’est à ce moment-là de son existence, qu’il entend parler du meurtre d’Herbert Molin qui fut le policier avec lequel il fit équipe quand il était une jeune recrue. Molin a été fouetté à mort. Les traces de ses pas sur le sol esquissant des mouvements de danse, un tango à mort, en somme.
Lindman décide de se rendre dans la petite ville de montagne où Molin est mort, pour enquêter, dans l’espoir de rendre service ou tout simplement pour « tuer le temps » et calmer l’angoisse qui le ronge.
Voilà le thème central du Retour du professeur de danse, roman de Henning Mankell, dans lequel n’apparaît pas Kurt Wallander qui est le personnage récurrent de beaucoup de ses récits. Roman à part que celui-là et qui permet de prendre conscience (si besoin était) que Mankell est un grand écrivain.
Il sonde les âmes, les reins et les cœurs. Il rentre au plus profond des personnages qu’il décrit. Et en même temps, il les inscrit dans la société suédoise qui subit les dérives propres aux sociétés occidentales.
Une des questions posées est celle du rapport à nos parents : que savons-nous d’eux et sommes-nous esclaves de ce que nous ignorons ? Que faire si l’on nous révèle des faits dont nous n’avions pas connaissance et qui permettent de réévaluer ou de dévaluer l’image de nos parents ?
Pourquoi les sociétés occidentales n’ont-elles pas réussi à éteindre complètement la flamme Nazie ? Pourquoi des groupes ou groupuscules d’extrême droite persévèrent-ils dans la propagation de la haine ?
Mankell mêle ainsi les interrogations les plus profondes concernant l’être humain et son implication dans l’histoire à un sens du récit qui n’est jamais pris en faute.
Il vous tient en haleine et joue avec l’intrigue comme un chat avec une pelote de laine. Au niveau du rythme, vous n’avez pas l’impression de dévaler les montagnes russes en retenant votre souffle, mais insidieusement, presque sans vous en rendre compte vous êtes emmaillotés dans les fils de la narration.
Bref, vous vous retrouvez pris dans la froideur d’un hiver suédois et vous y prenez un vrai plaisir de lecteur.