Régis Wargnier a bel et bien une qualité indéniable qui fait du cinéaste, un auteur assez attachant: il aime ses sujets. Il les embrasse. Il les pousse dans leur singularité avec une volonté qui va au delà de toute responsabilité commerciale. En gros si un scénario lui plait: il l’assumera en se moquant de toute industrie ou de ventes internationales.
Quand il filme Indochine pas de souci. Le film restera le sommet de son oeuvre. Son succès mondial. Mais en racontant, au choix, les tromperies d’une femme durant la Seconde Guerre Mondiale, les déboires d’un Soviétique, le combat de deux anthropologues pour faire des pygmées des hommes ou une fiction sur l’athlétisme handisport, Régis Wargnier s’est perdu dans des choix très personnels.
Pourtant il fait toujours correctement le travail. Il défend un classicisme élégant. Soporifique pour certains. Régis Wargnier ne fait pas la révolution. Loin de là. Il n’en fait qu’à sa tête. C’est son défaut et sa qualité. Son cinéma correspond à ses envies. Le voici donc investi d’une mission intéressante: il raconte le sort d’un Français durant l’arrivée des Khmers Rouges au pouvoir.
François Bizot est pris pour un espion et des mois de calvaire débutent pour cette homme, mariée à une cambodgienne et qui va rencontrer un étrange géolier, Douch, connu pour avoir dirigé l’un des plus monstrueux centres de torture durant ce règne de terreur.
C’est une histoire vraie. Avec beaucoup de retenue (un peu trop), Régis Wargnier va filmer ce lent duel entre les deux hommes. Dans une forêt luxuriante, le captif et le bourreau vont découvrir que tout n’est pas blanc ou noir. Que l’humanité se cache chez la pire des personnes. Joués avec subtilité, les deux personnages sont passionnants.
Hélas la fiction est un peu moins réussie, poussive et démonstrative. L’air cambodgien et sa douceur de vivre ont éteint les vertueuses intentions de Wargnier, qui réalise tout de même une oeuvre à saluer, qui soulève des questions intimes et politiques.
C’est donc le film d’utilité publique dans toute sa splendeur. Son aspect classique le glace un peu mais Wargnier propose quelque chose de différent une fois de plus, une réflexion forte, un rappel historique. Une histoire vraie, difficile à oublier!
Avec Raphael Personnaz, Kompheak Phoeung, Olivier Gourmet et Thanet Thorn – Gaumont – 17 Décembre 2014 – 1h34