Le premier mythe est celui des quatre âges et il est uniquement récité par une voix préenregistrée sur fond de projections d’images abstraites (est-ce le néant ? le chaos ?) aux lumières saccadées et aux sons oppressants, harassants. On est mis sous tension. Jusque là on se prend au jeu, l’intrigue fonctionne.
Après ce premier mythe qui fait également office de prologue suit celui de Térée et Procnée : ces deux amants, époux et parents qui en sont venus à se haïr jusqu’à commettre l’inimaginable. Ce mythe là est joué et les comédiens accompagnés de Christophe Rodomisto (à la guitare) et de Tatiana Mladenovitch (à la batterie) traversent toutes les phases de l’amour à la haine et la playlist évolue de Joe Dassin à Niagara en passant par du rock enragé, le tout dans un rythme fou. La décadence est en marche. On est curieux de la suite. Jusque là encore, pourquoi pas.
Le troisième mythe, celui de Phaéton – l’enfant en proie aux doutes et de se savoir fils du soleil (Pheobus) sans pouvoir en apporter la preuve publique – est également joué. Et on commence à perdre le sens, à ne plus parvenir à saisir la parole du mythe, son message. Focalisés sur la relation entre Phaéton et sa mère on en oublie presque celle centrale de la rencontre avec le père, la preuve d’amour donné par celui-ci et les conséquences dramatiques pour le jeune garçon (NDLR: Phébus cède à son fils, malgré ses réticences dues à son jeune âge, de conduire son char aux chevaux ailés et Phaéton en perd le contrôle, vide les mers et brule la terre jusqu’à ce que son père doive le foudroyer pour éviter le chaos). Certes Clyméné porte des lunettes de soleil et Phaéton un costume futuriste mais on manque d’éléments ou même seulement de plus d’indices pour saisir le propos et suivre la métamorphose. Bref, on n’y comprend déjà plus grand-chose.
De la même manière, le quatrième mythe, celui d’Erysichthon est présenté sous un angle tellement restrictif qu’il ne permet pas du tout d’en comprendre le sens. Erysichthon est représenté sous la forme d’un artiste contemporain fantasque dont on saisi un complexe de supériorité et une faible sensibilité à la nature, mais de là à égaler l’offense faite par Erysichthon à Cérès quand il abat le chêne sacré et la terrible vengeance que lui inflige Cérès (NDLR: elle le soumet aux tourments de la Faim), il y a un long chemin malheureusement complètement esquivé.
Le cinquième mythe – supposé être celui de Narcisse- fait l’objet d’une projection finale qui fait également office d’épilogue. La lumière et les sons sont toujours oppressants mais le message quasi inexistant.
Métamorphoses – Projet du Deun Doen Group
D’après les Métamorphoses d’Ovide et Contes d’Ovide de Ted Hughes
Jusqu’au 26 mars 2017
au Théâtre de l’Aquarium, la Cartoucherie
Mise en scène de Aurélie Van Den Daele
Avec Alexandre Le Nours et Mara Bijeljac (comédiens), Christophe Rodomisto (guitare) et Tatiana Mladenovitch (batterie)