Art-scène, Théâtre

Roméo et Juliette, Éric Ruf, Comédie française

ROMEO ET JULIETTE - De William SHAKESPEARE - Mise en scene et scenographie : Eric RUF - Costumes : Christian LACROIX - Lumiere : Bertrand COUDERC - Travail choregraphique : Glyslein LEFEVER - Avec : Suliane BRAHIM (Juliette) - Jeremy LOPEZ (Romeo) - Le 24 11 2015 - A la Salle Richelieu de la Comedie Francaise - Photo : Vincent PONTET
(c) Vincent Pontet

La pièce des amoureux de Vérone publiée en 1597 a ici son action déplacée dans l’Italie pauvre des années 1930. Surpris d’apprendre que la pièce n’a pas été donnée à la Comédie française depuis 1954, le moment s’en révèle d’autant plus historique.

Dans un décor de Vérone décrépite, Roméo et Juliette mis en scène d’Eric Ruf veut déjouer les attentes, démystifier l’histoire. Il réjouit parfois, déstabilise aussi. Pas de coup de foudre, une scène du balcon difficile à comprendre, un bal version music-hall, une Juliette aux allures d’Audrey Hepburn, un père déchainé déclenchant des scènes de rire impromptu.

Après un début difficile accentué par des approximations de texte, l’arrivée de Juliette impulse une belle énergie. Le rythme rapide témoigne de la fulgurance de cet amour culte. A chaque représentation de cette pièce de Shakespeare sur les planches, l’on se met à nourrir l’espoir vain que dans ce Roméo et Juliette l’amour durera toute leur vie.

C’est non sans audace qu’Eric Ruf a choisi ses comédiens dans la troupe. Serge Bagdassarian en Frère Laurent est convaincant. Laurent Lafitte et Pierre-Louis Calixte en Benvolio et Mercutio nous amusent, nous séduisent. Ils portent la fougue des jeunes de manière remarquable. Le choix de Jéremy Lopez pour Roméo laisse plus à désirer. Mais Suliane Brahim, malicieuse, gracieuse et encore petite fille en présence de son père incarne une Juliette extraordinaire.

Le nouvel administrateur général de la Comédie française reconnait en note d’intention avoir voulu retirer tout romantisme superflu. Mais un Roméo et Juliette intellectualisé qui ne fait pas rêver d’amour a des chances de décevoir.

« Pourquoi insultes-tu la vie, le ciel et la terre ? La vie, le ciel et la terre se sont tous trois réunis pour ton existence ; et tu veux renoncer à tous trois ! Fi ! fi ! tu fais honte à ta beauté, à ton amour, à ton esprit. Usurier, tu regorges de tous les biens, et tu ne les emploies pas à ce légitime usage qui ferait honneur à ta beauté, à ton amour à ton esprit. Les bénédictions pleuvent sur ta tête, la fortune te courtise sous ses plus beaux atours ; mais toi, maussade comme une fille mal élevée, tu fais la moue au bonheur et à l’amour. Prends garde, prends garde, c’est ainsi qu’on meurt misérable. Allons, rends-toi près de ta bien-aimée, comme il a été convenu : monte dans sa chambre et va la consoler ; mais surtout quitte-la avant la fin de la nuit, car alors tu ne pourrais plus gagner Mantoue ; et c’est là que tu dois vivre jusqu’à ce que nous trouvions le moment favorable pour proclamer ton mariage, réconcilier vos familles, obtenir le pardon du prince et te rappeler ici. Tu reviendras alors plus heureux un million de fois que tu n’auras été désolé au départ… Va en avant, nourrice, recommande-moi à ta maîtresse, et dis-lui de faire coucher son monde de bonne heure ; le chagrin dont tous sont accablés les disposera vite au repos. » Acte III, scène 3

Jusqu’au 30 mai 2016 Comédie française, salle Richelieu

Roméo et Juliette de William Shakespeare
Mise en scène et scénographie : Éric Ruf
Costumes : Christian Lacroix
Avec :
Suliane Brahim (Juliette)
Jeremy Lopez (Romeo)

 

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