Ce que l’on admire le plus dans la grande histoire du rock et de la pop, ce sont ces groupes indestructibles. Ils se forment. Ils se déforment (par le succès ou son contraire). Puis éclatent. Puis réapparaissent.
Finalement ils nous interrogent. En vieillissant, le rocker serait mieux qu’à ses débuts? Les exemples sont nombreux. Mais c’est souvent après la gloire, que l’on entend enfin le talent. La longévité amène le sérieux et l’expérience. Et ça ne va pas si mal, nos vieux héros toujours prêts à en découdre.
Voilà donc trois exemples de disques de stars un peu fripés mais toujours habités. Cela semble être le cas en tout cas des surprenants Suede. Finalement il reste un vieux pilier de la britpop et s’est révélé intéressant à observer.
Car c’est un groupe qui grandit. Les androgynes des débuts on laissait la place à des dandys fatigués et mais talentueux. Brett Anderson, digne descendant de Bowie et Mercury a conservé une voix pénétrante et un charisme mûr. Après un album concept plus que réussi, The Blue Hour, le groupe reprend ses vieilles habitudes : un disque de rock un peu glam un peu punk aux guitares puissantes et qui fait sourire: c’est un album fait pour la scène.
Séparés pendant six ans, entre 2004 et 2010, les membres de Suede trouvent une nouvelle jeunesse au fil de leurs albums. Leurs nouvelles chansons sont moins entêtantes mais ils possèdent un style inimitable qui donne l’envie de les revoir en concert. Et franchement, ça, c’est un exploit!
Tout comme Doggerel, le nouvel album des Pixies, autre groupe à la carrière contrariée. C’est un festival de séparations et de ruptures. Les envies solo de Frank Black. Les valses de bassistes. Les longues coupures. Difficile à suivre. Doit-on parler de ce groupe mythique au passé ou au présent?
A force, on ne s’attend plus à rien de leur part et c’est ainsi que l’on fut surpris par la force de frappe du très entraînant Beneath the Eyrie en 2019. Trois ans plus tard, ils sont déjà de retour mais est ce une bonne nouvelle tout cet empressement?
Leur nouvel effort est d’excellente facture. Black et ses potes se roulent dans la fange et apprécient visiblement tous les résidus et la poussière qui s’en dégagent: leur style est un aspirateur fatigué mais toujours irrésistible à tubes un peu raides, entre douceur et fulgurance.
Le groupe n’aspire pas à la sagesse mais ne cherche plus à choquer le bourgeois et les conventions. Il fait juste du rock et il est vraiment très bon.
Évidemment nous terminerons cette chronique avec cette vieille connaissance qui nous confirme à chaque album qu’il y a bien de la vie extraterrestre sur cette bonne vieille planète terre: Björk.
On croyait qu’elle avait totalement décollé de notre monde avec Utopia, étrange objet musical. Elle revient donc sur Terre avec Fossora, un nouvel album aux tonalités une fois de plus différentes.
Il y a du jazz, du classique, de la techno. C’est toujours un magma perpétuel de sons et Björk fait le bruit du volcan. Le tempérament aventureux de l’Islandaise résiste au temps et aux modes. Il s’agit d’un album tellurique, assez minéral et beaucoup moins perché que les précédents.
Et on a plus de facilité à la suivre. On devine même le folklore local dans des titres qui mutent en permanence. Ce n’est plus un album bizarre, ce sont des champignons musicaux (encore une joyeuse pochette). C’est ce côté Géo Trouvetou que l’on continue d’admirer chez cette artiste qui ne semble plus avoir de contact avec le monde. Cette fois elle tente de renouer en creusant dans d’étonnantes compositions. Reprendre contact. C’est finalement le point commun de ses trois œuvres de vieux artistes ravis de vieillir comme du bon vin. De vieilles canailles!