Anticipation minimaliste type Mad Max, The Rover est un film d’ambiance, sorte de western pesant dont l’intrigue prend corps dans le désertique bush australien.
Dans un monde qui semble avoir vu le système économique occidental s’effondrer, Eric, vagabond froid et sans attache, se fait voler son unique bien, sa voiture. Retrouver ceux qui l’ont volé devient une obsession. Il se met à les pister grâce à Rey, frère simplet de l’un des malfaiteurs.
Sans besoin de décors extravagants ou de contextualisation, David Michôd, auteur du sublime, lancinant et cru Animal Kingdom dépeint un futur proche où la survie individuelle, est la seule motivation qui animent les quelques âmes errantes des environs. Le film se présente alors comme une extension métaphorique de notre société au bord de l’implosion. C’est souvent le cas avec l’anticipation. Originalité de l’exemple en question, point de fioritures visuelles. Juste un film d’acteurs et de mise en scène où le comportement des personnages met en lumière un crépuscule de l’humanité telle que nous croyons la connaître aujourd’hui.
Lent et violent, The Rover est alors le moyen pour David Michôd d’affirmer une technique de réalisation et de narration tout en délicatesse. Mouvements de caméra calmes parfaitement contrôlés et photo impeccable permettent d’apprécier les paysages envoutants des terres australiennes, allégorie d’un homme revenu à ses instincts les plus naturels et bestiaux. Enfin, contribuant au le climat du film, les dialogues concis et les silences rappellent les plus grand westerns. Écriture et technique irréprochables donc qui dessinent une atmosphère étouffante et moite dans laquelle Guy Pearce exerce son métier de la façon la plus exigeante possible. Tendu et mutique, son jeu tout en retenue est fascinant. À ses côtés, Robert Pattinson en fait trop et malheureusement rompt la tension qui nous unit au film.
The Rover porte surtout un propos philosophique certain. Dans un univers sans valeur, aux existences vidées de leur sens, aux personnalités qui en cherchent et à celles qui se sont laissées aller à une douce folie apathique répondent les chemins sans détour et les routes toutes tracées de l’immensité du territoire intérieur australien. Une immensité qui paradoxalement enferme dans une violence sans limite.
Si le film est assez captivant, il est lent, incroyablement lent à tel point qu’on en vient parfois à se perdre un peu et à se questionner quant aux intentions de l’auteur. En fait, il faut du temps pour encaisser ce film dont le rythme assumé est en fin de compte légitimé.
Quête meurtrière crue, sans pitié et lancinante, The Rover, dont le rythme marque la griffe cinématographique de David Michôd, demande un certaine attention, méritée après digestion.
De David Michod avec Robert Pattinson, Guy Pearce, Scoot McNeary et David Field – Metropolitan – 4 juin 2014 – 1h40